Le Rwanda hausse le ton face à la France et l’Allemagne


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En réponse à l’arrestation à Francfort d’une proche du président Kagamé, le Rwanda s’apprête à lancer des mandats d’arrêt contre des responsables français qui seraient impliqués dans le génocide de 1994. Kigali a par ailleurs rappelé son ambassadeur en Allemagne et a exhorté son homologue allemand à quitter le territoire rwandais dans les « 48 heures ». La tension monte entre Kigali, Berlin et Paris.

Quarante-huit heures, c’est le délai qu’a accordé mardi le Rwanda à Christian Clages pour quitter son territoire. Le gouvernement de Paul Kagamé a en effet décidé hier d’expulser l’ambassadeur allemand. Il a par ailleurs rappelé Eugène Gasana, son homologue rwandais en poste à Berlin. Ce renvoi matérialise la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.

La réponse à l’arrestation de Rose Kabuye

Le Rwanda a pris cette décision unilatérale en réponse à l’arrestation dimanche à Francfort de Rose Kabuye, directrice du protocole du président Paul Kagamé. Cette dernière, accusée d’être liée à l’attentat contre l’avion de l’ex-président hutu Juvénal Habyarimana en avril 1994, attentat déclencheur du génocide rwandais, était sous mandat d’arrêt français depuis 2006, à l’initiative du juge Jean-Louis Bruguière. Placée sous écrou extraditionnel dans une prison pour femmes à Francfort, elle a reçu mardi la visite de Paul Kagamé et attend son extradition vers la France où elle devrait être jugée. Le président rwandais a déclaré qu’elle se portait bien et a critiqué l’attitude de l’Allemagne qu’il considère comme une atteinte à la souveraineté de son pays. Rose Kabuye a été interpellée alors qu’elle était en mission diplomatique avec un passeport diplomatique, elle « n’aurait pas dû » être arrêtée, selon lui. Une source officielle allemande a déclaré dimanche que Berlin était obligé de procéder à cette arrestation conformément à ses engagements européens.

Trente-trois responsables français mis en accusation

Cette rupture avec Berlin intervient deux ans après la rupture avec Paris. Kigali avait rompu ses relations diplomatiques avec la France en 2006 après que la justice française eut émis un mandat d’arrêt contre neuf responsables rwandais, accusés de complicité dans le génocide de 1994. Le Rwanda a donc à son tour décidé de mettre en accusation la France. Une source proche du parquet général du Rwanda a déclaré que la justice rwandaise s’apprêtait quant à elle à « émettre des mandats d’arrêt contre des hauts responsables militaires et civils français », impliquées selon elle dans le même génocide. L’identité des accusés n’a pas été précisée mais 33 personnes seraient mises en cause d’après le rapport d’une commission d’enquête rwandaise rendu public le 5 août dernier. Le gouvernement rwandais espère que « la justice internationale n’est pas une justice à deux vitesses » et que si les mandats d’arrêt sont délivrés, les responsables seront arrêtés tout comme l’a été Rose Kabuye.

Ces tensions risquent par ailleurs d’avoir un impact régional sur le règlement du conflit en République Démocratique du Congo (RDC). Paul Kagamé a déclaré que ces événements pourraient remettre en cause la collaboration du Rwanda avec la France et l’Union Européenne pour résoudre la crise en RDC.

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