Le procès des « Y en a marre » pose la question du droit à manifester au Sénégal


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Deux leaders du mouvement « Y en a marre » étaient jugés ce mercredi au tribunal des flagrants délits de Dakar pour « participation à une manifestation interdite ». Un procès qui intervient alors que le pouvoir interdit depuis une semaine toute manifestation politique place de l’Indépendance.

La salle n°7 du palais de Justice de Dakar est pleine à craquer. À la barre, quatre jeunes « yenamarristes » dont deux leaders du mouvement, les rappeurs Simon Kouka et Landing Bessane Seck alias « Kilifeu », comparaissent pour « participation à une manifestation interdite ». Une vingtaine de personnes avaient été arrêtées jeudi 16 février aux abords de la place de l’Obélisque où Y en a marre souhaitait camper pacifiquement pour réclamer le retrait de la candidature d’Abdoulaye Wade, manifestation qui n’avait pas reçu l’aval du préfet.

Le rassemblement n’ayant pas pu se tenir, les accusés ont plaidé non coupable de « participation à une manifestation interdite ». « Nous ne sommes pas là pour discuter du bien fondé ou du mal fondé de l’arrêté du préfet », rappelle le procureur de la République. « Le droit de manifester est reconnu dans la Constitution, mais encadré par la loi », insiste-t-il. Affirmant que les jeunes avaient « l’intention de manifester en dépit de l’interdiction », le procureur requiert une peine de six mois d’emprisonnement avec sursis contre les prévenus.

Avocat des « yenamarristes », maître Boucounta Diallo, une des figures du barreau sénégalais, commence alors sa plaidoirie et demande la relaxe « pure et simple » des quatre hommes. L’avocat parle d’un « procès politique » et évoque un « dossier vide ». « Ce procès, madame la présidente, pose la question des libertés dans notre pays », lance-t-il au juge. Pour maître Boucounta Diallo, le droit de manifester est garanti par la Constitution. « L’arrêté du préfet est illégal. Il viole la loi, observe l’avocat. Comment un arrêté peut venir remettre en cause la loi fondamentale ? » Pour conclure, l’avocat évoque une vieille affaire et invite les magistrats « à résister à toute forme de pression ». En 1988, plusieurs militants du parti démocratique sénégalais (PDS) dont Ousmane Ngom, l’actuel ministre de l’Intérieur, avaient été arrêtés à la Médina lors d’une manifestation de l’opposition interdite par le pouvoir socialiste.

Devant les juges, leur avocat avait obtenu gain de cause en expliquant que la Constitution leur permettait de manifester librement. Il s’agissait d’un certain Abdoulaye Wade… Le jugement des « yenamarristes » a été mis en délibéré au 27 février. Plus tard dans la journée, l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis, alliés traditionnels du Sénégal, ont appelé le gouvernement à respecter le droit à manifester librement et demandé à toutes les parties « d’éviter les violences ».

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