Le plan Obama : la recette miracle ?


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Alors que le président élu américain Barack Obama prendra ses fonction le 20 janvier, il vient de proposer son plan de relance, l’American recovery and reinvestment plan, qui sera peut-être signé mi-février. Avec une Amérique en récession, un taux de chômage déjà à 7,2 % qui pourrait monter à 9%, 2 ,6 millions d’emplois détruits en 2008, M. Obama n’entendait pas « perdre une génération de potentiel et de promesses ». Ce plan pourra-t-il justement remplir ses promesses, soit 3 millions de nouveaux emplois d’ici à 2011 essentiellement dans le secteur privé ?

Il faut noter tout d’abord que les observateurs ont été surpris par la structure du plan : il pourrait s’élever à 775 milliards de dollars, dont 300 millions de baisses d’impôts pour les travailleurs des classes moyennes (gagnant moins de 200.000 dollars par an) et les entreprises. A côté des dépenses pour doubler les énergies renouvelables, reconstruire certaines infrastructures de transports ou moderniser les locaux d’enseignement public, les baisses d’impôts n’étaient pas vraiment attendues en dépit des promesses de campagne. Les travailleurs recevront 500 dollars par an et 100 milliards de réduction d’impôts seront affectés aux entreprises (en particuliers pour celles qui ont connu des pertes en 2008 et 2009) et des crédits d’impôts d’un an pour les entreprises qui embauchent.

Baisser les impôts pour relancer l’économie

Ces baisses d’impôts, qui ont été proposées aussi pour séduire les Républicains, ne sont pas une mauvaise nouvelle. En effet, alors que l’économie dite keynésienne a considéré depuis fort longtemps que les dépenses publiques supplémentaires pouvaient stimuler l’économie, de plus en plus d’économistes tels Gregory Mankiw considèrent que l’effet « multiplicateur » des baisses d’impôts est plus élevé que celui des dépenses publiques. Le rendement économique plus élevé des baisse d’impôts s’expliquerait par plusieurs facteurs : les dépenses publiques de relance sont temporaires, elles ne sont très souvent pas efficaces parce que ne répondant pas à des besoins jugés comme prioritaires par les individus, et surtout elles peuvent générer des gaspillages du fait d’intermédiaires publics coûteux en matière de transfert de revenus entre les différents groupes sociaux et souvent mauvais gestionnaires. En rendant l’argent directement aux ménages et aux entreprises on peut d’une certaine manière éviter ces problèmes de mauvaise gestion voire de corruption.

M. Obama a donc sans doute eu raison de mettre l’accent sur les baisses d’impôts comme moyen de relancer l’économie. Mais il reste qu’une partie de la relance repose sur certaines dépenses publiques qui peuvent avoir des effets pervers. Ensuite, il faut replacer ce plan gigantesque dans la situation financière actuelle des Etats-Unis.

Les obstacles au plan Obama

En effet, l’économie américaine se trouve aujourd’hui dans une phase de correction des excès liés au crédit facile généré par les manipulations monétaires de la Fed. Cela pose deux problèmes au plan Obama. Premièrement, ce dernier risque d’empêcher ces corrections, et déclencher plus tard une dépression plus importante encore (ce qui s’est passé après 2001 et qui se paie aujourd’hui). Or, en plus de la politique monétaire de la Fed avec des taux à 0%, la politique publique américaine pourra faire perdurer l’illusion et repousser l’échéance des corrections, en augmentant au passage la dette colossale américaine.

Car, deuxièmement, le problème est que si l’économie américaine est extrêmement endettée, l’Etat ne l’est pas moins. Or, Mercredi le Congressional Budget Office (l’agence du budget du congrès US) estimait que le déficit budgétaire américain atteindrait 1200 milliards de dollars en 2009, soit 8,3 % du PIB US, et ce, sans compter le plan de relance. Si celui-ci était voté, le déficit atteindrait les 2000 milliards de dollars. Il faut ici se poser la question : comment les nouvelles dépenses publiques sont-elles financées au final ? Soit par les impôts payés par d’autres personnes, soit par l’inflation, une sorte d’impôt déguisé, ou encore par des emprunts publics qui devront être remboursés à partir de futurs impôts.

Or, il faut noter ici que la Chine, avec 650 milliards de dollars de bons du Trésor en octobre dernier, est désormais le premier créancier de l’Etat américain, devant le Japon. Elle pourrait ne pas demeurer ce prêteur de premier choix. L’Empire du Milieu est en effet aussi touché de plein fouet par la crise mondiale et a mis en place un plan de 600 milliards de dollars qu’il doit financer. Par ailleurs, la récession mondiale signifie aussi moins de dollars en Chine du fait de moins d’investissements étrangers directs, et d’une baisse de l’excédent commercial chinois, ce qui signifie moins de dollars pour acheter des bons du Trésor américain. Le « paramètre chinois » n’est certainement pas négligeable pour une nation américaine qui vit à crédit.

Si M. Obama a été bien inspiré d’intégrer des baisses d’impôts à son plan, la partie est loin d’être gagnée. Le plan Obama risque d’une part d’empêcher les corrections nécessaires pour l’assainissement de l’économie et d’autre part de se confronter à l’écueil des déficits et de l’endettement. M. Obama a d’ailleurs déclaré « comprendre ceux qui pourraient être sceptiques à l’égard de ce plan ». En réalité, si tous les grands Etats effectuent le même type de plans de relance, il n’y aura bientôt plus grand monde pour prêter et la planète fera face à une crise sans précédent de l’endettement.

Par Hicham El Moussaoui, docteur en économie, responsable des relations publiques pour www.unmondelibre.org et Emmanuel Martin, docteur en économie, responsable de la publication.

Un article publié en collaboration avec UnMondeLibre.org

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