Le Nigeria efface son ardoise auprès du Club de Paris


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Vendredi, le Nigeria a soldé son compte auprès du Club de Paris, un groupe qui réunit les principaux pays créanciers de la planète. Premier pays africain à réaliser cet exploit, Abuja a bénéficié en octobre dernier d’un accord lui permettant de s’acquitter de 12 milliards de dollars en lieu et place des 30 qu’il devait au Club. Toujours 12 de trop, selon les associations de lutte contre la dette des pays pauvres qui pensent qu’Olusegun Obasanjo aurait pu mieux faire.

« Nous sommes préparés à trouver une solution équitable et soutenable au problème de la dette du Nigeria, en 2005, dans le cadre du Club de Paris », avaient promis les ministres des Finances du G8, en juin dernier, lors des travaux préparatoires au sommet de Gleneagles (juillet 2005), en Ecosse. Un cadeau pour le pays d’Afrique de l’ouest, premier producteur de pétrole sur le continent et donc non éligible au processus des Pays pauvres très endettés (PPTE) et à l’annulation de la dette multilatérale décidée pour 18 pays de la planète. La dette d’Abuja envers les créditeurs du Club de Paris était en décembre 2004 de 30,8 milliards de dollars, contre 20,8 en 1998 et 7,8 en 1985.

En octobre 2005, le Club de Paris a décidé de la réduire de 60%, conformément à ce qui avait déjà été envisagé à Gleneagles, la faisant passer de 30 à 12 millions de dollars : 6,3 milliards correspondant à tous ses arriérés, payés en octobre, et 6,1 réglés vendredi dernier, a confirmé le ministre nigérian des Finances Ngozi Okonjo-Iweala. Le Nigeria doit encore 5 milliards de dollars aux institutions multilatérales comme la Banque Mondiale.

L’Irak mieux aidé que le Nigeria

Certains pays ont critiqué l’accord, arguant que le Nigeria compte parmi les pays les plus corrompus au monde. D’autres ont fait remarqué que la réduction pourrait constituer un coûteux précédent aux riches créanciers. Des membres du Congrès américain auraient même souhaité que l’accord soit conditionné à la remise du chef de guerre libérien Charles Taylor à la Cour spéciale pour la Sierra Leone, qui le recherchait pour crime de guerre, selon l’institut de recherche et d’analyse Brookings.

Au Nigeria, comme au sein des associations de lutte contre la dette, l’idée dominante est qu’il y avait autre chose à faire de 12 milliards de dollars dans un pays où « 75 millions de personnes vivent avec moins d’un dollar par jour et où 1 million d’enfants décèdent avant d’avoir atteint l’âge de cinq ans » (Communiqué du 2 décembre 2005 d’une dizaine d’associations de la société civile de 28 pays). D’autre part, « les Nigérians ont déjà payé cette dette au prix fort, rappelaient en octobre dernier l’ONG Jubilee Sud Nigeria et la Plate-forme française Dette et développement. Des 17 milliards de dollars empruntés initialement, ils ont remboursé 18 milliards ».

D’une manière générale, ces ONG auraient souhaité voir reconnue la notion de « dette odieuse », qui désigne les créances reconnues à un pays sous régime dictatorial, comme se fut le cas au Nigeria, sous Sanni Abacha, de 1993 à 1998. C’est cette notion que les Etats-Unis ont avancé pour l’annulation de la dette de l’Irak. Ils ont obtenu une ristourne de 80%, mais le FMI a bien pris soin de ne pas évoquer cette notion, de peur de créer un précédent. De nombreuses associations nigérianes estimaient d’ailleurs que le gouvernement Obasanjo, en position de force après que le parlement nigérian ait menacé au printemps 2005 de répudier la dette, aurait pu prétendre à mieux. « Il ne pouvait obtenir moins que les 60 % que lui avait promis le Club de Paris le 29 juin dernier. Il pouvait aspirer aux 80% d’allègement accordés en novembre 2004 à l’Irak », estiment Jubilee Sud Nigeria et la Plate-forme française Dette et développement.

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