L’Automne des Chimères de Yasmina Khadra


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Automne des chimeres

La dernière critique d’Olivia Marsaud dans le cadre de la série sur le polar africain.

Sorti en 1998, le troisième et dernier volet des tribulations du commissaire Llob, L’Automne des chimères, est sûrement le plus sombre et le plus désespéré des livres de Yasmina Khadra. Désespéré, à l’image de la nation algérienne, entraînée dans la tourmente d’une guerre civile effroyable. L’auteur nous livre, entre cynisme et amertume, sa vision -trop- lucide du drame algérien.

 » Mon bled n’est plus qu’une immense douleur… Je suis né ici, il y a très longtemps. On appelait cette époque le temps des colonies « . Le commissaire Brahim Llob est fatigué. Il a soixante ans et son pays lui a blanchit les cheveux trop tôt et fait pâlir son âme de poète. Car il ne s’est pas contenté d’être un policier intègre qui croit à la justice. C’est aussi un écrivain qui a osé croire à la liberté d’expression. Mis à pied à cause de ses écrits dénonciateurs, il refuse de faire des excuses publiques, et nous le suivons lors d’une mise à la retraite, qui est surtout une mise en quarantaine.

L’Ecrivain, c’est l’ennemi public numéro un dans un pays ou tout n’est que corruption, démagogie et magouilles, où les charognards côtoient les bourreaux, où les pompiers sont aussi les pyromanes. Face à cette situation, l’humour à double tranchant de Brahim fait mouche :  » – Vous êtes en retard commissaire – A l’image de la nation « .

Petits massacres entre amis

Avec un style incisif, qui touche là ou ça fait mal, Yasmina Khadra ne nous épargne rien. Les bombes, les gosses amputés, les familles massacrées, les traumatismes violents et profonds qui font le quotidien des Algériens :  » La mort, une fois banalisée, devient décor parmi les décors. C’est le calme qui s’ensuit qui s’en trouve suspect « .

Un livre aux accents autobiographiques, puisque Yasmina Khadra est un pseudonyme qui cache aussi bien une femme qu’un homme. Une personne en tous cas suffisamment courageuse pour coucher sur le papier une vérité que les officiels algériens s’entêtent à masquer.  » Un poète, ça ne fait pas de bêtise. Ca dévoile celle des autres « .

Commander le livre : Gallimard – éditions 2000

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