La langue des signes reprend ses droits


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Décision historique pour la langue berbère. L’Institut Royal marocain de la culture amazigh a tranché: le tifinagh sera l’alphabet d’écriture de la langue amazigh. Trois types d’alphabets étaient candidats : le tifinagh, le latin et l’arabe. Il sera bientôt enseigné dans les établissements scolaires. Le Maroc se réapproprie non sans difficultés, une tradition millénaire.

Le tifinagh sera l’alphabet d’écriture de la langue amazigh. Par ce geste le Maroc réhabilite tout un pan de son patrimoine. Selon Monsieur Boudris Belaïd, Directeur de la recherche didactique et des programmes pédagogiques de l’Institut Royal de la culture Amazigh (IRMCA),  » la décision n’a pas été facile, mais elle a le mérite de restaurer une tradition ancienne. C’est grâce au tifinagh que les femmes touaregs transmettent leurs savoirs aux enfants. Opter pour cet alphabet est un simple retour aux sources ». Au sein même du Conseil d’administration, la décision est venue par le recours au vote. Une majorité des deux tiers s’est alors dégagée au bénéfice du tifinagh, ancien alphabet constitué de 33 consonnes, 4 voyelles et 2 semi-voyelles. Sa standardisation en cours à l’Institut amazigh, peut lui apporter la souplesse et l’accessibilité qui lui manquent. Quant aux programmes d’enseignement et à leurs méthodes, ils seront déterminés par l’IRMCA en coordination avec le ministère de l’Education nationale.

Ancrage millénaire

Bien que l’amazigh, langue berbère essentiellement orale, n’ait pas été protégé par l’écriture, son alphabet le tifinagh est vieux de trois mille ans. Il a été utilisé pour des besoins décoratifs et artistiques en Egypte, au Niger, au Mali au Burkina Faso et aux îles Canaries. Il a traversé l’espace et le temps. Il est la langue la plus anciennement attestée au Maghreb. Son aire couvre près de cinq millions de km². La communauté la plus importante dont l’amazigh est la langue première se trouve au Maroc. De par son antériorité, elle constitue le premier mode d’expression de l’identité des Marocains. Cependant, elle n’a représenté jusque là qu’une valeur négligeable sur le marché des biens symboliques en raison de sa non-standardisation, de son évacuation des programmes scolaires et d’instances culturelles, administratives et économiques du pays. La langue arabe et la culture arabo-musulmane sont, elles, présentes au Maroc en tant qu’éléments constitutifs de l’identité culturelle marocaine depuis la pénétration de l’Islam au VII siècle.

Les mots se bousculent

Le choix de l’alphabet n’a pas été facile. Plusieurs tendances se sont exprimées soit en faveur du tifinagh, soit en faveur de l’alphabet latin ou en faveur de l’alphabet arabe. Très vite, cela s’est transformé en polémique. La transcription en caractères arabes pose problème : un mot en arabe est susceptible d’avoir plusieurs sens et présente des carences en matière technologique quant il s’agit de conception de programmes informatiques et de logiciels en arabe. L’alphabet latin présente l’avantage de pouvoir intégrer l’amazigh dans le système d’enseignement à moindre coût et rapidement. Mais là aussi, il n’y a pas de consensus. Le latin est porteur d’une autre culture et au vu des circonstances actuelles ne peut pas passer. Le choix du tifinagh, semble être une réponse politique à une crise identitaire exacerbée par une mondialisation effrénée.

Pour plus d’informations sur la culture amazigh :

Les alphabets tifinagh.

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