L’Algérie opte pour le solaire


Lecture 4 min.
arton21446

Le programme devrait aboutir à la production, d’ici 20 ans, à partir des énergies renouvelables, des mêmes quantités d’électricité produites actuellement à partir du gaz naturel. Le dernier rapport prévisionnel de la CREG prévoit pour les prochaines années une hausse importante de la demande intérieure en électricité et gaz.

Désormais, le soleil est une nouvelle priorité énergétique. Il ne devrait plus se coucher, puisque le gouvernement entend s’investir pleinement dans les énergies renouvelables. Youcef Yousfi, ministre de l’Energie et des Mines, l’a dit hier, inaugurant ainsi une nouvelle ligne stratégique du secteur, dont la boussole est résolument tournée, cette fois-ci, vers le soleil. Le ministre a indiqué, lors d’une conférence de Sonelgaz consacrée à la présentation du code d’éthique de cette entreprise, que l’Algérie s’apprête à lancer un «ambitieux» programme de développement des énergies renouvelables s’étalant sur 20 ans. L’objectif premier de ce programme étant de croître considérablement la production de l’électricité à partir de ces énergies alternatives.

D’après le successeur de Chakib Khelil, son département «présentera dans quelques semaines au gouvernement un plan de développement des énergies nouvelles et renouvelables (…) C’est un programme extrêmement ambitieux en matière d’énergies solaire, éolienne et de géothermique». La boussole de l’initiative vient, elle aussi, d’être réorientée vers le Sud, alors qu’elle était tournée jusqu’ici vers le Nord, d’où venaient les idées de Desertec et Transgreen, deux projets d’origine respectivement allemande et française. L’Algérie entend tout compte fait lancer son propre plan de développement des énergies renouvelables. Les détails de ce plan ne sont pas encore dévoilés.

Le ministre s’est contenté de préciser que le programme devrait aboutir à la production d’ici 20 ans, à partir des énergies renouvelables, des mêmes quantités d’électricité produites actuellement à partir du gaz naturel. Le ministre vient de faire basculer la stratégie énergétique du pays vers un autre secteur. Les dernières prévisions en la matière font ressortir l’objectif d’atteindre, à l’horizon 2050, une proportion de 30%, représentant la part des énergies renouvelables dans le plan énergétique du pays.
A moyen terme, soit à l’horizon 2015, l’objectif était d’atteindre le taux de 6%, la part de l’énergie renouvelable dans le plan énergétique national. Décidément, ces chiffres semblent être remis en cause. S’étalant sur 20 ans, ce programme, annoncé par Youcef Yousfi, devrait se matérialiser suivant trois étapes. La première étant une phase d’essai d’une durée de trois années destinée à identifier les technologies en matière des énergies renouvelables qui s’adaptent le mieux aux conditions climatiques de l’Algérie. Le programme prévoit également la conception et la réalisation des équipements liés à cette industrie. Cette mission a été confiée au groupe Sonelgaz qui sera désormais chargé de promouvoir la fabrication de ces équipements.

Le nucléaire de l’ère Khelil enterré

Youcef Yousfi vient ainsi d’enterrer l’ère Khelil fondée sur la seule idée d’implanter des centrales nucléaires, comme seule alternative aux hydrocarbures. L’Algérie avait comme objectif de préparer l’après-hydrocarbures en développant le nucléaire, en coopération notamment avec la France, les Etats-Unis, la Russie et l’Afrique du Sud. Pourquoi donc ce changement de cap qui vient d’être subito presto décidé ?

Deux raisons pourraient justifier éventuellement ce revirement, le renouvellement des réserves algériennes en gaz, nécessaires jusqu’ici à la production de l’électricité, n’est pas satisfaisant de l’avis des experts. En outre, les besoins futurs du marché intérieur de gaz sont importants, voire même non rassurants. Le dernier rapport prévisionnel de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG) prévoit pour les prochaines années une hausse importante de la demande intérieure en électricité et en gaz.

En effet, la consommation de gaz naturel devrait atteindre les 42 à 55 milliards de mètres cubes d’ici 2019 et celle de l’électricité 16 500 à 20 000 MW par année. D’où l’idée d’orienter le gaz vers la consommation interne et à l’exportation. L’électricité devrait être, elle, produite désormais à partir des énergies renouvelables. Le pays se fixe comme autre objectif d’arriver à concevoir et réaliser des centrales électriques par des entreprises nationales. Le défi est de taille. Mais l’Algérie dispose du plus grand gisement solaire au monde, d’une capacité estimée à plus de 3000 heures d’ensoleillement par an. Sa puissance est d’environ 1700 kWh/m2/an dans le nord du pays et 2263 kWh/m2/an dans les régions du Sud, selon les experts en matière d’énergie solaire.

D’autres experts du cabinet londonien Oxford Business Group estiment que pour crédibiliser sa stratégie de diversification énergétique, «l’Algérie devrait s’ouvrir aux investisseurs étrangers qui disposent d’un réel savoir-faire en la matière». Dans un rapport diffusé le 27 octobre dernier, traitant de la puissance des énergies renouvelables en Algérie, les experts d’Oxford Business Group ont conditionné la réussite de ce programme par le concours de firmes internationales spécialisées. «Etant donné que le développement des énergies renouvelables est très coûteux, il faut, pour le financer, parvenir à attirer des investissements étrangers. Or, l’établissement de partenariat n’est pas un exercice sans embûches», lit-on dans le rapport en question. Pour les perspectives de ce programme, Youcef Yousfi n’a pas écarté, hier, la possibilité d’exporter ces énergies si l’Algérie arrive à maîtriser la technologie et si l’Europe se montre prête à ouvrir son marché d’électricité. Selon Oxford Business Group, cette question «va peut-être devenir un sujet politique sensible».

Par Ali Titouche, pour El Watan

Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News