Guinée-Bissau : le nouvel état-major reste fidèle à Sanha


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Le pouvoir du président bissau-guinéen Malam Bacai Sanha n’est, semble-t-il, pas menacé. Le général Antonio Indjai, le nouveau chef d’état-major de l’armée guinéenne, souhaite néanmoins « juger » le Premier ministre Carlos Gomez Junior en résidence surveillée depuis jeudi. Le précédent chef d’état-major José Zamora Induta est toujours aux arrêts alors que le calme est revenu ce vendredi.

L’armée bissau-guinéenne s’est dotée jeudi d’un nouveau chef
d’état-major à la faveur d’un coup de force qui ne remet pas en cause la légitimité du président Malam Bacai Sanha. L’ancien chef d’état-major José Zamora Induta a été démis de ses fonctions et une quarantaine d’officiers ont été arrêtés, de même que le Premier ministre Carlos Gomez Junior. Libéré dans la journée, ce dernier a été maintenu en résidence surveillée par les militaires dirigés par l’ancien adjoint de José Zamora Induta, Antonio Indjai. Selon le service portugais de RFI, Carlos Gomez Junior serait désormais surveillé par des policiers et tous les militaires arrêtés maintenus en détention à proximité de l’aéroport de Bissau, la capitale. Miguel Martins, le correspondant de la radio internationale française, rapporte que le pays connaît une accalmie ce vendredi saint.
Le nouveau chef d’Etat major avait appelé jeudi la population au calme et assuré qu’il s’agissait d’une affaire « purement militaire ». « Les forces armées bissau-guinéennes tiennent à informer l’opinion nationale et internationale que les événements survenus ce jeudi matin sont un problème purement militaire qui ne concerne donc pas le pouvoir civil en place », a indiqué le général Indjai dans un communiqué diffusé sur les antennes de la radio nationale.

«Un problème de soldats»

Le nouveau commandement militaire a été rejoint par le contre-amiral Bubo Na Tchute qui serait à l’origine du coup d’Etat raté du 6 août 2008. Il serait également très lié au réseaux de trafic de drogue dont la Guinée-Bissau est une des principales plaques tournantes en Afrique de l’Ouest. L’officier s’est exilé en Gambie dont il est revenu en décembre dernier pour se réfugier dans les bâtiments des Nations unies. Il les a quittés quelques heures avant l’arrestation du Premier ministre et du chef d’état-major par les mutins. « Je veux lancer un appel au peuple, a-t-il déclaré jeudi lors d’une conférence de presse conjointe avec Antonio Indjai. Quiconque sortira dans la rue pour manifester sa solidarité envers le Premier ministre sera balayé de la rue ». Plusieurs centaines de personnes s’étaient en effet réunies pour protester contre l’arrestation du Premier ministre. « Il a commis beaucoup d’erreurs et il devra en répondre devant la justice », a fait valoir Bubo Na Tchute. Le général Antonio Indjai compte même le « juger ». « Cadogo (surnom du Premier ministre) est un criminel et il doit être jugé comme tel », a-t-il confié jeudi à l’AFP. « Induta (le général José Zamora Induta) et Cadogo doivent payer pour tous les crimes qu’ils ont commis ».

Si l’action du Premier ministre est remise en cause par les nouveaux chefs militaires, il n’en est rien de celle du président, Malam Bacai Sanha. Démocratiquement élu, il succède depuis juillet 2009 à Joao Bernardo Vieira assassiné le 2 mars de la même année par des militaires. Le chef d’état-major de l’armée, le général Batista Tagmé Na Waïe, avait également péri quelques heures plus tôt dans un attentat à la bombe. Le chef d’Etat bissau-guinéen a assuré jeudi que « la situation est sous contrôle ». « Il y a eu un problème entre militaires qui s’est étendu aux autorités civiles », a-t-il indiqué après une rencontre avec le nouvel état-major de l’armée. « J’userai de mon influence pour trouver une solution pacifique à ce problème entre soldats », a-t-il ajouté. Malam Bacai Sanha aurait d’ailleurs affirmé qu’il ne s’agissait pas d’un « coup d’Etat », selon le journaliste de RFI Miguel Martins. Terme utilisé notamment par le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner. La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a qualifié la situation en Guinée-Bissau de « tentatives de déstabilisation ». Le Portugal, ancienne puissance colonisatrice, les Etats-Unis, l’Union européenne et les Nations unies ont condamné l’action militaire et souhaitent le retour à l’ordre constitutionnel. L’Union Africaine (UA), par la voix de Jean Ping, réclame pour sa part le respect de « la discipline républicaine ».

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