Guerre fantôme


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Deux mois après le début des hostilités dans la région du Pool entre l’armée gouvernementale congolaise et les rebelles du pasteur Bitsangou, les informations filtrent toujours au compte-gouttes.

De notre envoyée spéciale à Brazzaville

Voilà plus de deux mois que les Forces armées congolaises (Fac) tentent de venir à bout de la rébellion engagée le 29 mars dernier par les ninjas du pasteur Bitsangou, alias Ntumi. Après l’échec des multiples médiations auprès du chef rebelle, le gouvernement congolais tourne désormais le dos à toute négociation et attend la reddition de ses partisans. La semaine dernière, l’armée a regagné du terrain. Elle affirme avoir repris et sécurisé lundi 27 mai trois localités importantes du Pool, Kimba, Vindza, fief de Ntumi, et Kindamba, réduisant ainsi la zone contrôlée par les ninjas. Sans toutefois être en mesure de localiser la présence de ces derniers.

Mais au fur et à mesure que  » la simple opération de police  » se transformait en guérilla, la communication du gouvernement s’est opacifiée concernant le déroulement, la localisation et les conséquences des combats. Alors que les premiers jours des informations filtraient sur le nombre de victimes (officiellement 38 parmi les miliciens et 6 dans l’armée) et le lieu des combats, l’armée distille aujourd’hui les informations avec parcimonie. Non qu’elle ait quelque chose à cacher, précise le ministère de l’Intérieur, mais elle attend la fin des hostilités -qu’elle estime proche- pour en faire le bilan.

Premier couloir humanitaire

L’opération d’envergure, menée la semaine dernière, a pourtant permis de créer un premier couloir humanitaire dans la région. Une mission de l’Onu -la première depuis le début du conflit- a pu se rendre mardi dernier à Kindamba pour évaluer les besoins en soins et en vivres des populations qui ont fui les combats. Mission, suivie d’une deuxième samedi dernier, destinée à mettre en place les premières infrastructures d’aide aux 2 000 personnes regroupées sur le site. Distribution de vivres, d’ustensiles de cuisine, de médicaments et installation de latrines pour « enrayer les épidémies qui commencent à faire leur apparition », explique William Paton, coordinateur du système des Nations Unies au Congo.

De retour de mission, il a constaté l’ampleur des destructions matérielles et fait état de signes de malnutrition et de multiples maladies, tout en estimant que « la situation sanitaire n’est catastrophique ni sur ce site, ni parmi les 20 000 déplacés accueillis dans des familles de Brazzaville ». Ses inquiétudes vont davantage aux quelque 14 000 personnes dispersées dans les forêts environnantes et privées de toute aide.

Bilan contradictoire des combats

Mais si le représentant onusien est rassurant sur la santé des populations, il a en revanche porté de graves accusations sur le comportement de l’armée. Dans une déclaration du 29 mai dernier à l’Agence France presse, il a affirmé que des femmes avaient été violées dans les champs par des militaires le jour même de la mission de l’Onu. Affirmation reprise, depuis Genève, par Mary Robinson, Haut Commissaire aux droits de l’homme, qui estime en outre que les attaques des hélicoptères de l’armée ne font aucune discrimination entre les rebelles et les civils.

Informations aussitôt démenties par le ministère de l’Intérieur qui précise que dans cette région « les hommes en uniforme responsables des viols ne font pas forcément partie de l’armée régulière ». Tout en reconnaissant l’utilisation d’hélicoptères équipés de mitraillettes et de roquettes pour répondre aux tirs de mortier des ninjas, il indique que les populations ont à chaque fois été prévenues et évacuées des zones concernées par les combats.

Pour des raisons de sécurité, nul n’est autorisé à se rendre sur les lieux des combats. On compte pour l’instant une vingtaine de blessés évacués sur les hôpitaux de Brazzaville, et des témoignages concordant, recueillis à Kindamba, recensent une douzaine de morts.

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