Botswana : Dépénaliser la prostitution pour lutter contre le Sida


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Le Botswana est l’un des pays au monde où le virus du sida contamine le plus de personnes. Pour limiter les risques d’infections, l’ex-président botswanais, Festus Mogae, entend faire des recommandations au gouvernement et au parlement quant à la libéralisation de la prostitution.

Festus Mogae, ancien président du Botswana (1998-2008), distingué par le Prix Mo Ibrahim il y a quelques années et chef du Conseil national sur le Sida, tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur la propagation du virus. Déjà, en juin 2001, lors d’une déclaration à l’Assemblée des Nations Unies, Mogae avait alerté la communauté internationale sur la situation. « Nous sommes menacés d’extinction. Chaque jour, un nombre effrayant de personnes meurt du sida. C’est une crise d’une ampleur et d’une gravité inouïes », avait-il déclaré. Le Botswana est, en effet, l’un des pays les plus durement frappés par le virus du Sida. En 2007, le nombre de personnes atteintes du VIH était de 300 000, sur une population totale de moins de 2 millions d’habitants. Un adulte sur quatre est contaminé.

Pour contrer ce fléau, le Président Mogae souhaite que la prostitution, un des moteurs du virus, devienne légale afin de limiter les risques. La prostitution est monnaie courante dans ce pays. En la légalisant, M. Mogae pense que les policiers se concentreraient sur autre chose plutôt que de passer leur temps à courir après les filles de joie. Mais c’est aussi et surtout pour les convaincre de dénoncer, avec l’appui de la police, les personnes qui les forceraient à avoir des rapports sexuels non protégés. Au lieu de cela, ces filles sont contraintes de jouer au jeu du chat et de la souris avec les forces de l’ordre. Quand certaines sont attrapées, elles écopent d’une amende et leurs recettes sont confisquées. Parfois, les moins chanceuses se retrouvent, en plus, contraintes d’assouvir gratuitement les désirs sexuels de certains policiers en échange de leur liberté.

Vers une légalisation de la prostitution ? Les pour… Et les contre

Le but de Festus Mogae est d’assurer à ces femmes une protection et d’éviter que les rapports aient lieu sans préservatifs. Cela dit, il précise que cette dépénalisation ne doit pas être prise comme une forme d’encouragement à la prostitution. Mais uniquement pour « protéger celles qui ont été forcées à se prostituer ».

Le Parti démocratique du Botswana (BDP), qui a été dirigé par Festus Mogae, n’a pas pris de position claire à ce sujet mais a fait savoir qu’il soutenait la proposition de son ancien dirigeant. Ce qui a provoqué la colère des groupes religieux très puissants dans ce pays. « Selon les valeurs chrétiennes, le sexe est destiné aux personnes mariées, dans un objectif de procréation », a annoncé le porte-parole de l’Église catholique, William Horlu. « Il est tabou d’avoir des relations sexuelles pour de l’argent et j’espère que le Botswana, qui est un pays chrétien, ne permettra pas la dépénalisation de ce commerce », a-t-il ajouté. Mais Mogae trouve, en plus du BDP, le soutien du Réseau botswanais sur l’éthique, le droit et le VIH/Sida. « La pénalisation du travail du sexe rend les prostituées vulnérables aux abus sexuels et physiques ainsi qu’aux infections au VIH. Le même risque menace les hommes qui ont recours à leurs services, et les partenaires de ces hommes. C’est un cercle vicieux qui doit être brisé », précise son président Uyapo Ndadi, dont les déclarations ont été rapportées par l’AFP.

Par ailleurs, le gouvernement encourage les hommes à aller se faire circoncire afin de limiter les risques de propagation. Face à des essais cliniques concluants sur l’efficacité de la circoncision contre le virus du Sida, un programme santé a été lancé afin de circoncire 80% des botswanais sur cinq ans, soit environ 460 000 hommes.

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