Blaise Compaoré réinvesti à la tête du Burkina Faso


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Élu officiellement à 80,15% lors du scrutin du 21 novembre, Blaise Compaoré a prêté serment et été investi pour cinq ans, lundi, à Ouagadougou, dans ses fonctions de président du Burkina Faso, en présence d’une dizaine de Chefs d’États africains. Il a fait la promesse d’un Burkina émergeant alors que l’opposition radicale conteste sa légalité et sa légitimité.

De notre correspondant

CompaoreInvestiture2.jpg« Je jure devant le peuple burkinabè et sur mon honneur de préserver, de respecter, de faire respecter et défendre la constitution et les lois, de tout mettre en œuvre pour garantir la justice à tous les habitants du Burkina Faso », a fait serment Blaise Compaoré, lundi à Ouagadougou pour son investiture à la tête du Burkina Faso, devant un parterre de personnalités, dont une dizaine de ses pairs africains.

Dans son discours d’investiture, Blaise Compaoré a repris pour l’essentiel ses promesses électorales, censées, selon lui, faire du Burkina Faso un pays émergeant à l’horizon 2015. « Au cours des cinq prochaines années, mon action reposera sur l’engagement individuel et collectif autour des questions majeures de consolidation de l’investissement humain, de développement des institutions et de renforcement de la bonne gouvernance, de promotion des leviers de l’émergence et d’instauration de nouvelles dynamiques pour l’économie » a annoncé Blaise Compaoré qui a promis par ailleurs, insuffler un « dynamisme accru aux secteurs à fort potentiel d’exportation et de valeur ajoutée comme les activités minières et agropastorales. »

L’opposition dénonce un président illégal et illégitime

CompaoreInvestiture3.jpgSi Blaise Compaoré est à la fête, ses opposants les plus radicaux continuent à contester vigoureusement sa réélection. Dimanche, la veille de l’investiture, les candidats malheureux à la présidentielle, Hama Arba Diallo, Boukary Kaboré dit Le Lion, François O. Kaboré et Me Bénéwendé Sankara, qui avaient par ailleurs jugé le scrutin illégal, ont au cours d’un meeting dit de « vérité », déclaré nulle la prestation de serment de Blaise Compaoré. « La proclamation des résultats dans des conditions illicites ne peut conférer aucune légitimité ni légalité au candidat Compaoré. Sans compter que celui-ci a été déclaré vainqueur avec moins de 2 millions de voix alors que notre pays compte plus de 6 millions de potentiels votants » ont-ils déclaré. Déboutés par les juridictions burkinabè, qui ont néanmoins reconnu la carte électorale illégale sans pour autant annuler le scrutin, les quatre candidats prévoient désormais saisir les juridictions supranationales.

Mais à Ouagadougou, ces gesticulations de l’opposition n’émeuvent presque plus. La cause est déjà entendue et les préoccupations sont ailleurs. Maintenu au pouvoir par une coalition hétéroclite de partis politiques et d’associations, Blaise Compaoré a désormais la tête à la constitution de son nouveau gouvernement, qui a coup sûr, sera fortement coloré et des bonzes de son parti originel, le Congrès pour la Démocratie et le progrès, pourraient se voir débarqués au profit d’amis de la majorité présidentielle. Ils se contenteront, peut-être, de sièges au futur sénat, que projette de créer le président Compaoré. Dans le jeu de chaises musicales orchestré par Compaoré, personne ne se perd et tout se transforme.

Investiture ou intronisation ?

Alors qu’on le soupçonne fortement de vouloir faire sauter le verrou constitutionnel de la limitation des mandats présidentiels, Blaise Compaoré 59 ans, dont 23 passés à la tête de l’État burkinabè, est resté peu disert sur la question, préférant la noyer dans la mare des réformes politiques et institutionnelles qu’il prévoit. Mais il aura beau occulté le sujet, un fait n’aura pas passé inaperçu au cours de cette cérémonie d’investiture. Jouant d’ordinaire à l’occasion de l’intronisation du Mogho Naaba, le roi des mossé, l’ethnie majoritaire au Burkina et dont est issu Blaise Compaoré, les tambourineurs royaux de Koupéla, sous l’œil des principaux chefs coutumiers, ont relayé la garde nationale dans l’animation musicale de la cérémonie d’investiture. L’investiture d’un président de la République équivaudrait-elle à l’intronisation d’un roi ? Rappelant ces propos du Pr Basile Guissou, un des penseurs du régime Compaoré, au cours d’une émission de débat politique à la télévision nationale burkinabè, appelant à «l’indigénisation d’une démocratie burkinabè trop française », les commentateurs de la chaîne publique présents à la prestation de serment de Blaise Compaoré, n’y ont vu aucun mélange des genres, évoquant plutôt le mariage des cultures. Pour autant, cette symbolique culturelle ne peut effacer une réalité irréfutable. Blaise Compaoré a aussi bâti sa popularité grâce aux influents chefs coutumiers, dont l’intrusion dans le jeu politique est décriée par certains.

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