Benflis démarre sa campagne en France


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L’ex-Premier ministre algérien Ali Benflis, candidat aux présidentielles du 8 avril 2004, est en campagne électorale en France pour trois jours. Avant de rendre visite aux électeurs algériens expatriés, il a plaidé sa cause, vendredi, au Centre d’accueil de la presse étrangère de la Maison de la radio, à Paris. Il a profité de l’occasion pour égratigner le Président Abdelaziz Bouteflika, qui n’a toujours pas indiqué s’il se représenterait.

Ali Benflis lance sa campagne électorale en France. Le secrétaire générale du Front de libération nationale (FLN, premier parti du pays ), candidat aux présidentielles du 8 avril prochain, en Algérie, a entamé une visite de trois jours sur le territoire français pour rendre visite aux électeurs algériens expatriés. Avant d’animer un meeting à Saint-Denis, samedi prochain, l’ex-Premier ministre algérien a fait un détour par le Centre d’accueil de la presse étrangère (Cape) de la Maison de la radio, à Paris. Ali Benflis s’est présenté durant la conférence de presse comme le candidat du changement démocratique et a concentré ses attaques sur le Président Abdelaziz Bouteflika, qu’il accuse d’instrumentaliser l’administration pour se faire réélire. Il est sobrement revenu sur les déclarations du chef d’Etat major de l’Armée nationale populaire (ANP), Mohamed Lamari, et a confirmé qu’il n’était actuellement pas question pour lui de se retirer de la course électorale. Toutes les questions n’ont pas été librement abordées, durant la conférence, Ali Benflis, pourtant invité à le faire, n’étant pas revenu sur ses années et ses responsabilités de Premier ministre dans le précédent gouvernement.

Mouloud Hamrouche a déclaré jeudi qu’il se retirait du groupe des onze et de la course à la présidence, parce que les jeux étaient déjà faits ? Le groupe était également réuni pour discuter de la question d’un retrait commun des élections…

Ali Benflis :
Le groupe des dix est un groupe de personnalités politiques, réunies pour mettre en commun leurs moyens de faire que les élections présidentielles se déroulent dans des conditions de transparence. Nous réclamons ainsi le remplacement du gouvernement actuel par un cabinet intérimaire consensuel, chargé de la préparation et de la gestion des affaires courantes. Cela permettra la neutralité du gouvernement dans les futures élections. Nous demandons également l’installation d’une instance indépendante, pour instruire et contrôler l’administration, dans les phases de préparation, d’organisation et d’exploitation des élections. Nous faisons des propositions en tant que groupe, mais chacun a également la possibilité de s’exprimer en son nom. Celui qui veux se retirer fait un choix personnel. Je suis le candidat d’un parti. J’ai personnellement choisi une autre voie que celle de Mouloud Hamrouche et je maintiens ma candidature.

Comme à chaque élection, l’armée a de nouveau fait savoir qu’elle ne se mêlerait pas du scrutin en Algérie…

Ali Benflis :
L’armée s’est exprimée par le biais du chef d’Etat major Mohamed Lamari, qui a déclaré qu’elle avait quitté le champ politique. Je n’ai pas à en douter. Mais au moment où l’armée s’exprimait, le Président candidat Abdelaziz Bouteflika investissait tous les secteurs de l’administration pour l’instrumentaliser à ses fins. Il y a une instrumentalisation de la justice, pour empêcher certaines candidatures. Et même l’administration des Affaires étrangères est instrumentalisée, puisqu’on y a installé un service de déstabilisation du plus grand parti du pays, qu’est le FLN.

Le Président Abdelaziz Bouteflika a annoncé la présence d’observateurs internationaux pour les élections du 8 avril. Qu’en pensez-vous ?

Ali Benflis :
Quand l’administration est forcée de soutenir un candidat, quand la justice est instrumentalisée pour poser des difficultés à certains candidats, quand l’utilisation éhontée des médias publics profite à un candidat, on appelle les observateurs internationaux. C’est à la suite de la visite à Alger du secrétaire d’Etat américain chargé de la Démocratie, des Droits de l’homme et du Travail, que le Président candidat a écrit au Président Bush pour lui indiquer que des observateurs internationaux seront présents lors des élections. Vous me demandez si je suis pour ? Je suis ni pour ni contre. Mais l’essentiel du dispositif qui doit assurer la transparence des élections doit être un dispositif interne. Quelquefois, les observateurs internationaux sont utilisés pour camoufler une fraude préparée.

La désespérance de la jeunesse algérienne risque de l’amener à ne pas voter lors du prochain scrutin. Qu’est ce qui fait de votre candidature une candidature crédible, pour eux ?

Ali Benflis :
C’est le programme que je propose à la jeunesse, qui concerne l’emploi, les grands travaux… Je plaiderais pour que le système actuel ne perdure pas. Si on veut le changement, il faut s’investir. S’investir, c’est essentiellement voter.

Le Code de la famille fait-il parti de votre programme ? Etes-vous pour son abrogation ?

Ali Benflis :
Le Code de la famille fait parti de mon programme électoral. Depuis le 20 mars 2001, nous avons œuvré au sein du FLN pour que la femme puisse se porter sur des listes électorales, en bonne place pour pouvoir être élue. C’est ainsi que le FLN compte 20 femmes députés, le plus grand chiffre depuis l’Indépendance. Dans les Assemblées locales et communales, nous avons de 2 à 300 femmes élues. Il y a des tenants de l’abrogation du Code de la famille, des tenants de son maintien, pour ma part, je suis pour son amendement. Je pense qu’il est possible d’amender certains points pour faire évoluer la société.

L’actuel Premier ministre a proposé au Mouvement citoyen de Kabylie de soumettre l’officialisation de la langue Tamazight à un référendum. Que pensez-vous de cette question ?

Ali Benflis :
En ce qui me concerne, j’ai toujours été un homme de dialogue. Sur ce dernier point, il faut voir que les discussions se sont déroulées en pleine campagne pré-électorale. Ça sent trop l’électoralisme. Il vaut mieux laisser ces questions à des moments de plus grande tranquillité. Je sais que le règlement de la crise en Kabylie est possible. Il y a beaucoup de bonne volonté de la part du mouvement citoyen et de la population. Je suis convaincu que je pourrais, personnellement, faire des propositions le moment venu pour sortir de la crise. Mais ce n’est pas maintenant que je vais les faire, en prenant le risque de les escamoter et de les faire passer pour des propositions électoralistes.

Vous avez en quelque sorte été victime de ce que les Algériens appellent la hogra (l’abus de pouvoir, l’injustice, ndlr), en décembre dernier, lorsque la justice à gelé les comptes de votre parti et interdit la réunion de son 8è Congrès. Le soulèvement de milliers d’Algériens en 2001, pour protester contre cette même hogra, s’est soldé par des centaines de morts et les ministres concernés sont restés en place. Qu’avez-vous pu faire, à ce moment, alors que vous étiez Premier ministre, et que pourriez-vous faire de plus si vous étiez élu ?

Ali Benflis :
Je suis pour la constitution d’un Etat où chacun joue son rôle. L’institution présidentielle doit être respectée dans ses attributions et doit respecter celle des autres. Je ne crois pas en un système politique qui fait du Président quelqu’un qui s’arroge le pouvoir des autres. Ce qui se passe actuellement, lorsque le Président gouverne par ordonnances, provoque la marginalisation du Parlement, qui est l’expression de la volonté populaire. De la même façon, on ne peut pas accepter que la justice soit aux ordres, qu’elle serve le politique. Ce qui s’est passé pour le FLN en est le meilleur exemple : les textes disent expressément que la justice, fut-elle administrative, n’est pas compétente pour trancher les conflits au sein des partis. C’est pourtant ce qui s’est passé pour le FLN.

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