Africaura : l’Afrique vue par les Africains


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De gauche à droite, François Milis, Joseph Dandjie et le producteur japonais T. Fujiyama

Une série télévisée pour permettre aux Africains de se découvrir dans leurs aspirations, leur espoirs, leur philosophie de la vie et les préjugés dont ils sont victimes. C’est le rêve d’un homme : le cameraman camerounais Joseph Dandjie. Son projet « Africaura, la voix africaine » est pour l’heure une exposition de 52 tableaux d’artistes camerounais.

Du pouvoir de l’image. Joseph Dandjie, cameramen-réalisateur à la CRTV, la radio télévision camerounaise, depuis 1986, pourrait en parler des heures. Surtout quand il s’agit de sa trouvaille : « Africaura, la voix africaine » ou comment mettre les images au service du développement du continent africain. « J’ai collaboré avec des professionnels de divers horizons, notamment japonais. Le producteur Teruo Fujiyama assure par exemple la promotion d’Africaura dans son pays. Partout, j’ai pu comprendre la façon dont l’image avait pu illustrer ou servi à imaginer la prospérité d’une nation, d’un peuple. A côté de cela, je me suis rendu compte que l’Afrique n’était pourvoyeuse que d’images exotiques et de misère produites par des médias étrangers », explique le Camerounais.

La solution : produire ses propres images, une façon de reconquérir l’estime de soi. Comment ? C’est toute la raison d’être d’Africaura, concept qui a germé en 1995 dans l’esprit de Joseph Dandjie. Son objectif : mettre en images l’aura de l’Afrique, « cette force vitale qui entoure quelque chose ou une personne et qui n’est pas toujours visible à l’œil nu ». Pour se faire, l’homme d’images à décidé de concevoir une série télévisée dont la thématique tourne autour de la culture mise au service du développement. « Il faut que les Africains apprennent à produire les images qu’ils ont d’eux-mêmes, à projeter une image positive d’eux-mêmes, au lieu de laisser ce soin à d’autres qui ont une vision caricaturale de leur continent». Pour marquer les esprits, la production audiovisuelle devra faire l’objet d’une large diffusion en Afrique, mais pas seulement. « Les Africains ont besoin de voir une Afrique qui marche parce que quand ils comparent leur continent aux autres, grâce à Internet notamment, ils voient le progrès partout, sauf chez eux. Nous vivons sur la même planète mais nos horizons semblent si différents.»

L’Afrique mise en images par des Africains

Première étape du projet Africaura : formaliser les angoisses, les espoirs et les interrogations des sociétés africaines. Joseph Dandjie réunit alors un panel d’universitaires à l’occasion d’un colloque autour du thème culture et développement. Toutes les problématiques mises en relief feront chacune l’objet d’un épisode de la future série télévisée. « Afin de faire de matérialiser l’essence du projet, j’ai décidé de faire traduire chacun des épisodes en tableaux de peinture. » Dix artistes, étudiants en Arts plastiques à Yaoundé et à Ngaoudéré, au Cameroun, produisent en deux ans 52 oeuvres. L’exposition Africaura est née et contribuera également à éveiller l’intérêt d’un producteur éventuel. AfricAura Art Expo est présentée pour la première fois à Yaoundé en juillet 2004. La cinquantaine de toiles voyage ensuite vers les Etats-Unis grâce à la costumière américaine, Kate Thaw, et à l’ONG internationale Music and Arts Foudation, installée dans le Massachusetts, que dirige son époux.

Africaura, qui fait aujourd’hui l’objet d’une tournée aux Etats-Unis, inspire en 2007 l’exposition éponyme Americaura et est découverte par l’ambassadrice des Etats-Unis au Cameroun, Janet E. Garvey. Originaire du Massachusetts, la diplomate prend ses fonctions au Cameroun en septembre 2007. Elle œuvrera pour que l’exposition Africaura et son jumeau américain soient vus dans ce pays. Depuis le 28 septembre 2008, à la Bibliothèque nationale à Yaoundé, Africaura est de nouveau visible en terre camerounaise. L’étape suivante pour Joseph Dandjie et Vincent Ndoumbè, son comparse camerounais dans l’aventure Africaura ? L’écriture scénaristique et la réalisation de la série. Mais les fonds nécessaires à la concrétisation de son rêve manquent encore. Le prix décerné, dans la catégorie entrepreneuriat lors de la première édition du concours Harubuntu, vitrine des potentiels africains, qui s’est déroulée cette année, devrait lui offrir une plus grande visibilité. «Je ne souhaite pas me précipiter. Les préjugés sont si nombreux qu’il faut en rendre compte de la façon la plus pertinente possible. Pour cela, nous avons mis en place un autre atelier pour établir des questionnaires afin de cerner les archétypes qui seront développés dans la série. Rendre son idée fonctionnelle, utile et opérationnelle, c’est cela qui permet de bien construire son concept et lui donner les chances de prendre corps.» La voie africaine est longue à construire et se peaufine à chaque instant. Joseph Dandjie a, pour lui, la patience d’un chasseur… d’images.

Visiter le site du concours Harubuntu

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