Affaire Chebeya : l’heure de vérité ?


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Le procès des assassins présumés de Floribert Chebeya, responsable de l’association la Voix des Sans Voix (VSV), s’ouvre vendredi à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC). Un procès public et radiotélévisé très attendu par l’opinion publique, mais critiqué par les ONG de défense des droits de l’homme.

Plus de cinq mois que tout un pays l’attend. Le procès des assassins présumés de Floribert Chebeya, leader de l’association de la Voix des Sans Voix, 47 ans, s’ouvre vendredi à Kinshasa, plus de cinq mois après sa mort. Huit policiers dont le chef des services spéciaux sont jugés pour « association de malfaiteurs, enlèvement, assassinat et terrorisme ».

Le crime avait défrayé la chronique. Une onde de choc énorme, qui avait dépassé les frontières de la République Démocratique du Congo (RDC) pour se répendre jusque dans les gazettes mondiales. Militant respecté et connu, le président-fondateur de la Voix des sans voix a été retrouvé mort le 2 juin dans sa voiture, les mains liées dans le dos, sur une route en périphérie de Kinshasa, le lendemain d’un rendez-vous, qui n’a pas eu lieu, avec le chef de la police, le général Numbi, Son chauffeur, qui l’avait accompagné au rendez-vous, est toujours porté disparu et son corps n’a jamais été retrouvé. L’activiste travaillait sur des dossiers très sensibles comme les massacres perpétrés au Bas-Congo, notamment début 2007, et une série d’arrestations arbitraires et de disparitions forcées.

Mais pour la Voix des sans Voix, ce procès a un goût amer. Vendredi, c’est devant une Cour militaire que comparaîtront les huit policiers impliqués dans le meurtre de Floribert Chebeya. Alors que tous s’attendaient à l’ouverture du procès devant les juridictions civiles, le Parquet Général de la République a préféré se dessaisir de cette affaire le 28 octobre pour la confier ensuite à l’Auditorat Général Militaire, au motif que tous les suspects sont des officiers supérieurs de la Police Nationale.

Une parodie de procès?

Les associations de défense des droits de l’homme y voient un subterfuge juridique permettant de « soustraire à la justice » le principal suspect de l’affaire, le général John Numbi, qui n’est pas justiciable devant cette cour. En effet, « aucun officier de la Cour militaire n’est du grade du général Numbi alors que selon la loi, il ne peut être jugé que par quelqu’un de son rang ou d’un rang supérieur » dénonce Rospin Manketa de la Voix des sans voix. L’association s’insurge donc « contre un plan visiblement préétabli, visant à organiser une parodie de justice qui, au lieu de faire éclater la vérité à travers une justice juste et équitable sur le double assassinat entre les mains de l’Etat, voudrait blanchir des suspects à l’autel des intérêts politiques et partisans et consacrer ainsi l’impunité en RDC ».

Ce procès s’ouvre alors que la situation relative aux droits de l’homme est toujours précaire en RDC. Les meurtres et arrestations d’opposants, de militants associatifs et de journalistes n’ont pas cessé. Dernière affaire en date, celle de l’étrange suicide d’Armand Tungulu. Arrêté le 29 septembre à Kinshasa après avoir jeté une pierre contre le convoi du président Kabila, Il avait été retrouvé mort trois jours plus tard dans une cellule du camp Tshatshi de la Garde républicaine (GR, ex-garde présidentielle). Les autorités judiciaires congolaises affirment qu’il s’était suicidé dans la nuit du 1er au 2 octobre. Une version contestée par les associations des droits de l’homme et la famille de la victime, qui réclament une enquête internationale.

Bien que controversé, le déroulement de ce procès dira beaucoup de la volonté de la RDC d’œuvrer en faveur des droits de l’homme. Un procès que la veuve et tous les enfants de feu Floribert Chebeya suivront du Canada, où ils sont réfugiés depuis le mois de septembre.

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