RDC : feu vert à un troisième mandat pour Kabila ?


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Au Congo-Kinshasa, le dialogue a connu son épilogue. L’accord politique qui en est issu a été adopté « par acclamation » ce lundi 17 octobre. En échange du glissement concédé à Joseph Kabila, Vital Kamerhe devrait obtenir la Primature. Mais cet accord, fruit d’un dialogue auquel n’ont pas pris part deux poids lourds de l’opposition (Tshisekedi et Katumbi) ni les principales organisations de la société civile, pourrait n’être appliqué que durant un laps de temps limité.

« Dès le départ, les dés étaient pipés ; le scénario, écrit et connu d’avance », note un observateur attentif de la vie politique kinoise (lire à ce sujet nos articles « Kamerhe, futur Premier ministre de Kabila ? » et « Kamerhe offre un troisième mandat à Kabila »). « Les grandes lignes de l’accord ont été éventées bien en amont. Si certains ont pris part au dialogue, c’était bien dans l’espoir de ne pas se laisser distancer au sein de l’opposition, d’obtenir la primature et de se trouver dans une position plus favorable pour préparer l’élection présidentielle », analyse-t-il, dans une allusion à peine voilée à Vital Kamerhe. D’emblée, la personnalité du facilitateur Edem Kodjo a renforcé cette impression d’un « petit arrangement en famille ». Proche de Zuma et de Kabila, il n’est jamais apparu comme neutre.

Un accord jugé peu satisfaisant sur le fond

Cet accord politique, au final, ne règle presque rien sur le fond. Certes, une date pour la tenue de l’élection présidentielle est avancée. Mais elle est à la fois lointaine (fin avril 2018) et incertaine… L’accord ne contient que de très faibles garanties pour la faire respecter. « Kabila ne respecte pas la Constitution. Comment peut-on imaginer qu’il observera un vulgaire engagement couché sur un bout de papier ? », fait mine de s’interroger un responsable de Filimbi. Plus grave, l’accord en question ne prévoit aucune disposition stipulant l’interdiction pour le Président actuel de se représenter. « Joseph Kabila pourrait mettre à profit cette transition à rallonge pour repousser encore la date de l’élection, au motif de l’absence de financement suffisant ou pour une raison technique quelconque, et organiser un référendum modifiant la Constitution afin de lui permettre de repartir balles neuves », analyse un professeur en droit public de l’UniKin. « Cet accord n’est pas le fruit d’un compromis, mais d’une compromission. Toutes les digues, tous les garde-fous ont sauté », s’inquiète, quant à lui, un membre du Front Citoyen. Ce matin, Le Potentiel, l’un des grands quotidiens kinois, titrait : « Dans un an, Kabila sera candidat. »

Un accord qui manque d’inclusivité et de légitimité

Le dialogue n’ayant pas été inclusif, il souffre immanquablement aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale d’un manque de légitimité. « Cet accord n’engage que ses signataires, et nullement le peuple congolais », prévient un membre de l’opposition. Même son de cloche du côté de la société civile, dont les principales organisations (CENCO, Lucha, Filimbi…) se sont tenues à l’écart d’un dialogue, perçu d’emblée comme un piège. Dans son dernier communiqué, La Lucha déclare que « l’accord entre Kabila et Kamerhe est une forfaiture que la communauté internationale ne doit pas prendre le risque de cautionner », évoquant même un « coup d’Etat constitutionnel ». Un point de vue partagé d’ailleurs, dans une très large mesure, au sein de cette communauté internationale. « En fait de dialogue, on a assisté durant un mois et demi à un soliloque. Le Président Kabila a toujours battu la mesure et, au final, c’est son point de vue qui a prévalu », fait observer un diplomate en poste à Kinshasa. L’Union Européenne a réitéré aujourd’hui son appel en faveur d’un dialogue plus inclusif et représentatif. Elle envisage, à son tour, de prendre des sanctions contre les autorités en RDC.

Et maintenant ?

Deux scénarios sont possibles :

 soit un dialogue véritablement inclusif est amorcé en présence des principaux leaders de l’opposition et d’un nouveau facilitateur. La réunion de Luanda – prévue le 26 octobre sous l’égide de la CIRGL, des Nations Unies, de la SADC et de l’Union Africaine – pourrait en être la première étape, même si nombre en doutent compte tenu du caractère légitimiste des organisations africaines précitées, toujours très promptes à défendre leurs pairs, chefs d’Etat, au pouvoir.

 soit le dialogue est impossible et dans ce cas, c’est l’épreuve de force dans la rue. Déjà le mercredi 19 octobre, une journée ville-morte est prévue en guise de nouvel avertissement à l’endroit du Président Kabila.

Mais si rien ne bouge, le véritable rendez-vous pourrait avoir lieu à partir du 20 décembre 2016, date à partir de laquelle Joseph Kabila exercerait sa charge de façon extra-constitutionnelle. La RDC sombrerait alors dans l’inconnu ; et peut être à nouveau, comme beaucoup le redoutent, dans le chaos.

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