Nouveau rapport de Survie « La coopération militaire et policière en Françafrique : de l’héritage colonial au partenariat public-privé »


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A l’occasion du discours de politique africaine qu’Emmanuel Macron entend faire à Ouagadougou le mardi 28 novembre, l’association Survie publie un rapport sur la coopération militaire et policière entre la France et des Etats africains. Cette nouvelle publication éclaire et dénonce la continuité du soutien que les autorités françaises apportent à certaines des pires dictatures du continent. Pour Survie, il s’agit d’interpeller le président de la République, au moment même où il va prétendre incarner un renouveau de la politique africaine de la France. L’association appelle à la transparence sur la coopération militaire et policière et demande sa suspension immédiate avec des régimes qui répriment brutalement leur population, comme en ce moment au Cameroun et au Togo.

En octobre 2014, face à l’ampleur de la contestation populaire, le dictateur Blaise Compaoré avait été contraint de démissionner, et avait été discrètement exfiltré par les militaires français de l’opération Sabre. Aucune évolution de la coopération militaire et policière n’a été annoncée depuis, ni avec le Burkina Faso ni avec d’autres pays où des régimes autocratiques sont toujours en place.

Pour Thomas Borrel, porte-parole de Survie, « en venant faire son discours de politique africaine à Ouagadougou, où des manifestants à mains nues ont poussé à la démission un dictateur soutenu pendant 27 ans par la France, Emmanuel Macron ne doit pas faire comme si les mécanismes institutionnels de la Françafrique avaient soudainement disparu. La coopération militaire et policière en fait partie, et pour le moment la France la maintient avec des régimes qu’elle devrait contribuer à isoler et fragiliser. Ne rien annoncer à ce sujet, ce serait instrumentaliser l’insurrection burkinabè sans en tirer les leçons. »

Dans son rapport publié ce lundi, Survie démontre de façon précise qu’en dépit de la réforme de la coopération de 1998 et des réductions de moyens et de la baisse importante des effectifs de « conseillers » détachés auprès des autorités civiles et militaires africaines, l’armée, la police et la gendarmerie françaises ont maintenu un lien privilégié avec des forces de l’ordre pourtant régulièrement impliquées dans une répression féroce des opposants et des mouvements citoyens. En évoquant un glissement vers une forme de « partenariat public-privé », les auteurs du rapport alertent également sur la montée en puissance d’opérateurs privés sur fonds publics européens, de collectivités locales et même de la réserve parlementaire, et sur la recherche de nouvelles sources de financements telles que des fondations d’entreprises. Après avoir exposé cette évolution et le cadre institutionnel actuel de cette coopération, et dénoncé le manque de transparence qui entoure ces pratiques, le rapport prend pour illustration les répressions meurtrières récentes au Cameroun et au Togo.

Pour Thomas Borrel, « il y a aujourd’hui un double enjeu à ce que les parlementaires se saisissent de l’enjeu de la coopération militaire et policière. D’une part, il est inacceptable que cette coopération soit maintenue, au nom d’un prétendu ‘renforcement de l’État de droit’, avec des régimes qui répriment mortellement leur population. D’autre part, il y a une véritable omerta organisée sur le sujet : aujourd’hui, en dehors du gouvernement et de l’état-major, personne ne peut savoir précisément la nature du soutien que nous apportons à tel ou tel pays. C’est d’ailleurs très pratique pour prétendre être simplement ‘attentifs’ à la situation lorsqu’il y a des exactions comme au Togo et au Cameroun en ce moment ! »

L’association Survie demande la transparence sur la coopération militaire et policière et sa suspension immédiate avec des appareils répressifs qui commettent de graves violations des droits humains.

Le rapport est disponible au téléchargement ICI

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