La population africaine veut se sentir protégée face à la menace terroriste


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Principale cible des groupes terroristes, les pays africains doivent renforcer la coopération interétatique dans les domaines du renseignement et de la surveillance. Mais seule une présence forte des pouvoirs publics auprès de la population pourra enrayer la spirale de la violence.

On ne le dit pas souvent, mais l’Afrique est le continent le plus touché par les attaques djihadistes depuis janvier 2015. D’après l’Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED), pas moins de 4 523 attentats mortels ont été perpétrés dans 44 des 54 pays africains. Si le Nigeria, le Soudan et la Somalie sont les pays les plus touchés, d’autres Etats paient également un lourd tribut, notamment le Cameroun, le Tchad, la Libye, l’Egypte, la Côte d’Ivoire, le Mali, la Somalie et le Kenya.

L’Afrique, un continent habitué à la terreur ?

La présence de groupes terroristes sur le continent n’est malheureusement pas nouvelle. Depuis au moins une dizaine d’années, l’Afrique semble devoir s’habituer à la terreur. Dans la bande sahélienne, les activités des groupes islamistes radicaux laissent un bilan de 3,5 millions de réfugiés et près de 20 000 civils morts. Dix capitales du continent ont été la cible de prises d’otages et d’attentats meurtriers : Tunis, Tripoli, Bamako, Abuja, N’Djamena, Niamey, Kampala, Nairobi, Djibouti et Mogadiscio.

Les groupes terroristes qui sévissent en Afrique, dont certains figurent parmi les plus violents et meurtriers au monde, disposent de ressources humaines et matérielles considérables qui renforcent leur présence et capacité de nuisance. Les experts estiment que Boko Haram compte entre 5 000 et 7 000 hommes, les shebab 3 000 à 5 000, AQMI et Al-Mourabitoune un millier. Le cas de Daesh est particulièrement préoccupant. Non seulement parce qu’il dispose de quelque 2 500 combattants, mais aussi parce qu’il attire de nombreux djihadistes subsahariens, en particulier francophones. Selon le journaliste François Soudan, deux milliers de Maliens, Nigériens, Tchadiens, Sénégalais et Soudanais seraient partis combattre entre la frontière syro-irakienne et le nord de la Libye.

Or, si les Etats africains doivent améliorer leur coopération dans les domaines du renseignement et de la surveillance, il est également indispensable d’apporter des solutions aux problèmes concrets que vivent les populations au quotidien afin d’éviter que les jeunes Africains ne se laissent tenter par les fausses promesses des extrémistes. Il faut mettre en place des politiques publiques qui prennent en compte toutes les zones et les populations. La présence de l’Etat doit être renforcée, la lutte contre le chômage des jeunes doit être la priorité des gouvernements africains. Ceux-ci doivent proposer des alternatives à tous ceux qui croient pouvoir trouver dans la violence une réponse à leurs besoins matériels et spirituels. La société civile doit de son côté s’impliquer dans la sensibilisation de la jeunesse sur les dangers que représente le discours radical, lequel se nourrit des sentiments d’angoisse et de frustration de certains jeunes.

Eviter que les victimes d’aujourd’hui ne deviennent les bourreaux de demain

Bien que nécessaires, les réponses d’ordre sécuritaire ne feront pas tout. Il faut aussi essayer de comprendre et prêter une oreille attentive aux clameurs de la population. Ainsi, en Côte d’Ivoire le Président Alassane Ouattara a annoncé le renforcement des dispositifs de sécurité immédiatement après l’attaque de Grand-Bassam, le 13 mars. Mais les autorités ont également débloqué 250 millions de FCFA (400 000 euros) pour soutenir les hôteliers, les artisans et les travailleurs des plages de la ville, car la reprise des activités économiques a été à juste titre jugée nécessaire afin de ne pas se laisser intimider par les actes terroristes et pour redonner aux citoyens l’espoir et le courage de continuer à vivre.

Pour sa part, Dominique Ouattara (Nouvian de son nom de jeune fille), Première dame du pays, a rendu personnellement visite aux blessés de l’attaque terroriste internés dans les différents centre hospitaliers et cliniques d’Abidjan. Accompagnée d’une forte délégation gouvernementale, la Première dame a apporté sa compassion et un soutien matériel à la vingtaine de blessés par balles, dont plusieurs enfants. « En ce moment difficile que connait notre pays, je voudrais présenter mes condoléances à toutes les familles éplorées qui ont perdu des êtres chers, pour leur dire combien je suis peinée et combien je les soutiens dans leur souffrance et dans leur douleur », a déclaré la Première dame qui, par ce geste, témoigne de l’importance que les pouvoirs publics accordent aux préoccupations concrètes et quotidiennes de la population.

Il s’agit d’un geste nécessaire non seulement d’un point de vue humanitaire, mais aussi politique, car seul l’engagement effectif et concret de l’Etat auprès de la population pourra éviter l’escalade guerrière et empêcher que les victimes d’aujourd’hui ne deviennent les bourreaux de demain.

Par Alain Tchombè

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