Kossi Modeste : « rien n’était impossible à celui qui croit et qui agit »


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Il y a 5 ans, l’entrepreneur Kossi Modeste lançait son magazine sur la cuisine afro-caraïbéenne « Afrocooking ». Aujourd’hui, le média est vendu à plus de 35 000 exemplaires dans le monde. Le 7 juillet 2018 prochain, le franco-togolais se lance un nouveau défi : l’organisation d’un festival des cuisines d’Afrique « We Eat Africa ». A la veille de son évènement, le jeune homme originaire d’Orléans a accepté de répondre à nos questions, afin de mieux se laisser découvrir. Entretien

Vous avez quitté le Togo à l’âge de cinq ans, racontez-nous un souvenir d’enfance de votre vie à Lomé avant de partir pour la France ?

Kossi Modeste : Je suis né et j’ai grandi à Tokoin, mon papa et ma maman vivaient là-bas et nous y avions un magasin en face de l’hôpital. Je regardais la route par la voiture et je me rappelle qu’à 4 ans, j’ai quitté la maison pour me rendre seul, à pied, à Fréau Jardin pour aller voir ma tante, que j’aimais beaucoup. Arrivé sur place, tout le monde était surpris car j’étais très jeune pour un tel trajet seul. Le goût de l’aventure m’a toujours animé, j’aime découvrir les choses.

A quel âge êtes-vous retourné au Togo ?

Kossi Modeste : J’avais 17 ans ! Mes parents estimaient que j’étais un petit voyou et ils avaient peur pour mon avenir car je sortais beaucoup et sans prévenir, même si j’aimais l’école. A l’époque, nous vivions dans un quartier sensible d’Orléans. Ils m’ont donc envoyé « au bled » comme on disait, je devais y rester un an. Au début, c’était le choc, puis la vie simple de Lomé proche des réalités m’a plu. J’ai trouvé une formation à l’Item (Institut Technique d’Electronique et de Micro-informatique). Au final, cela m’a plu et j’ai décidé de rester durant trois ans. L’éducation que j’ai reçue m’a beaucoup aidé. Ma mère disait souvent : « si tu veux quelque chose tu ne le voleras pas, travail pour l’avoir ». Mon père aussi m’a beaucoup appris. Il m’a fait arrêter le football car il avait peur qu’il me détourne des études. J’étais furax. De plus, à chaque vacance, je devais lire un livre et lui en faire un résumé. C’est bien après que j’ai compris là où il voulait en venir et je l’en remercie aujourd’hui.

A la maison, vous dites avoir eu comme modèle une famille dans laquelle papa et maman cuisinaient ensemble. Qu’est-ce que cela vous a enseigné sur la parité homme/femme lorsque nous savons que sur le continent et ailleurs, beaucoup d’hommes considèrent encore que seule la femme a sa place en cuisine?
Kossi Modeste :
En réalité, même dans nos sociétés très patriarcales, les femmes ont toujours entrepris mais on ne les mettait pas en valeur, ce qui est différent aujourd’hui, car avec le women empowerment enfin elles occupent la place qu’elles auraient toujours dû avoir. La nouvelle génération est en train de prendre la place qui lui revient de droit c’est tout à fait légitime. Je ne suis pas d’accord avec cette pression constante sur la femme a qui on demande, implicitement ou non, d’arrêter son métier pour élever les enfants etc. Je pense que ce sont des changements salutaires au bien-être de tous, et qui sont en train d’arriver en Afrique également.

Avec votre équipe, vous allez organiser “We Eat Africa” un festival dédié à la cuisine africaine en juillet prochain à Paris, c’est un rêve qui se réalise ?

Kossi Modeste : Oui, ce festival est important pour nous parce que nous avions envie d’apporter autre chose au-delà de la cuisine. C’est d’ailleurs avant le chef Anto, rédactrice en chef d’AfroCooking, qui est au-devant de tout cela, car c’est son domaine. Notre motivation première était la visibilité et lorsque nous nous sommes rendu compte qu’un évènement de ce genre n’existait pas, on s’est dit que nous allions l’organiser nous-mêmes pour être également maître de nos savoir-faire.

Un festival culinaire sur l’Afrique à Paris, c’est une première du genre, pouvez-vous nous dire un peu ce que le public est en droit d’attendre d’un tel évènement ?

Kossi Modeste : Il y aura plein de choses (sourire) comme des conférences autour de la cuisine avec des thèmes comme la cuisine fusion contre la cuisine traditionnelle par exemple. Nous comptons aussi faire le cheminement avec nos visiteurs de la terre à l’assiette en invitant des agriculteurs, des cuisiniers, des exposants, des chefs comme le chef Anto bien sûr, mais aussi Alexandre Bella Ola Christian, Rougui Dia, Fatema Hal, etc. Ce festival sera aussi l’occasion de réfléchir aux problématiques liées à la cuisine africaine. Nous aurons aussi des ateliers pour enfants car c’est à cet âge-là que nous pouvons mieux transmettre le goût de la cuisine aux enfants.

Découvrir le festival des chefs africains We Eat Africa

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