Gabon : l’opposant André Mba Obame rompt le silence


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Il est encore malade, mais promet de reprendre bientôt le combat politique

L’opposant André Mba Obame est au centre de folles rumeurs depuis plus de 5 mois. Tantôt on le dit mort, tantôt très malade et interné chez des féticheurs équato-guinéens. L’ancien ministre de l’intérieur n’a fait aucune déclaration publique depuis le mois août 2012, ce qui a contribué largement à alimenter la rumeur. Il vient finalement de rompre le silence dans une longue interview accordée à l’hebdomadaire Les Echos du Nord, dans sa parution de lundi. OMA comme on l’appelle affectueusement s’est dit « prêt à reprendre le combat politique » et a invité le peuple à une grande mobilisation pour la lutte pour la démocratie et la liberté au Gabon.

Dans ses premiers propos dans le journal, Mba Obame a donné les raisons de son silence et a livré ses sentiments à l’opinion publique. « A votre avis, dans la vie, faut-il répondre à toutes les rumeurs ? Avant tout j’avais mieux à faire, notamment à me faire soigner, car j’étais bien malade et ceux qui se sont acharnés sur moi savent de quoi je parle. J’ai même appris que des sommes colossales avaient été mises en jeu pour m’éliminer de la surface de la terre, d’où toutes ces folles rumeurs sur ma prétendue mort. Vous savez, dans nos villages, il est souvent dit que lorsque des gens vous souhaitent la mort ou lorsqu’ils veulent trop vite vous enterrez, ils doivent savoir qu’en réalité ils vous ajoutent la vie », a déclaré l’opposant. Il ajoute qu’au lieu de répondre à des rumeurs méchantes et politiciennes au mépris de la dignité humaine, il a préféré se consacrer à l’essentiel.

Je suis prêt à reprendre le combat

Dans cette longue interview de trois pages, André Mba Obame a déclaré qu’il est encore malade, même si son état de santé est « bien meilleur » que lors de son retour à Libreville le 11 août 2012. « Je suis pratiquement et physiquement prêt à reprendre le combat politique pour la libération de mon pays. Pour vous dire, je me sens aujourd’hui à 70% de mes capacités. En fait, les problèmes mécaniques que j’avais sont amoindris, je me sens beaucoup plus alerte et en confiance spirituellement et je puis vous dire que ma rééducation fonctionnelle se déroule normalement. D’ici peu de temps, je crois que ça ira », a-t-il affirmé.

L’ex ministre de l’intérieur a affirmé dans le même registre que son état de santé est entrain de s’améliorer « grâce à une impressionnante mobilisation de forces spirituelles » et aux soins intensifs de la médecine traditionnelle. « Je sais que tout cela n’est pas rationnel ni cartésien, mais le croyant que je suis peut vous dire que des gens se sont mobilisés aussi bien chez les catholiques, les protestants, les églises de réveil que chez les musulmans ou au sein des religions traditionnelles que sont le bwiti et le melane », a souligné Mba Obame.

Appel à la mobilisation

Répondant aux questions du journal, l’opposant a invité les Gabonais à la mobilisation, pour la poursuite du combat pour la démocratie et la liberté au Gabon, car selon lui, un nouveau cycle a commencé et les espoirs du peuple ont de fortes chances de se matérialiser en 2013.

« L’union nationale (UN, dissoute) et l’union des forces pour l’alternance (UFA, regroupement de partis d’opposition) militent pour faire échec à toute velléité monarchique et établir une démocratie véritable dans notre pays. Dans le contexte actuel, ces forces sont incontournables ! Je profite d’ailleurs de l’opportunité que vous m’offrez (…) pour adresser mes félicitations aux présidents Myboto, Ogouliguendé, Ndaot, Maganga Mousavou, Eyeghé Ndong, Mouity Nzamba, Kombila, Bengone Nsie et Eya Mvey entre autres, pour le formidable travail de rassemblement et d’unité de l’opposition démocratique qu’ils abattent sans cesse, en dépit de toutes les manœuvres d’isolement et d’intimidation orchestrées par les forces de régression tapies dans l’ombre de la soi-disant émergence », a déclaré Mba Obame critiquant les autorités de Libreville, qui sont selon lui, sont de plus en plus discréditées sur la scène internationale et auprès des amis du Gabon. « Des dissensions et des fissures apparaissent au sein du régime gabonais, et même dans la famille Bongo censée être le socle de ce régime. Et puis il n’est pas besoin d’avoir une loupe pour se rendre compte du divorce profond entre le peuple gabonais et ses gouvernants actuels », a ajouté l’opposant.

La CEMAC porte les germes de l’avenir de notre pays

Sur le thème de la présidence CEMAC du Gabon, André Mba Obame a avancé dans cette interview que les autorités de Libreville n’ont pas pris le sujet au sérieux et qu’aujourd’hui elles sont entrain de faire les choses avec précipitation, alors que le mandat du Gabon à la tète de cette organisation prend fin au mois de juillet prochain. « Croyez-vous qu’en six mois qu’il soit possible d’identifier nos axes d’intervention, mobiliser les ressources, les moyens et les partenariats nécessaires et procéder à la mise en œuvre de la stratégie retenue ?», s’est interrogé l’homme politique, avant d’ajouter : « Pour moi la CEMAC est un sujet sérieux qui porte en lui les germes de l’avenir de notre pays et je ne saurais tolérer qu’il soit noyé parmi tant d’autres sujets. Car, que nous le voulions ou non, le Congo, le Cameroun et la Guinée Equatoriale sont et resteront à jamais nos voisins. L’avenir du Gabon se construira donc avec eux ».

La dernière partie de l’interview de l’opposant contient des chiffres assez révélateurs sur le mal-être de la population. André Mba Obame affirme que 70% de la population gabonaise ne mange pas à sa faim et que le Gabon occupe le 7e rang mondial des pays où la population éprouve des difficultés à se nourrir. 3 Gabonais 4 ont du mal à se loger et 61% des Gabonais n’ont pas confiance à leur force de sécurité et à leur système judiciaire. 28% des Gabonais rêvent de s’exiler pour tenter leur chance ailleurs. Ces chiffres révélés par l’opposant radical au régime Bongo sont issus d’un récent sondage de l’institut Gallup.

Le chef de fil de l’opposition radicale a terminé son propos en citant Ghandi : « Quand je désespère, je me souviens que tout au long de l’histoire la voie de la vérité et de l’amour a toujours triomphé. Il y a eu dans ce monde des tyrans et des assassins et pendant un temps, ils peuvent nous sembler invincibles et à la fin, ils tombent toujours ».

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