Egypte, deux ans après Morsi


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Deux ans, jour pour jour, après l’éviction du Président islamiste Mohamed Morsi, par l’armée, l’Egypte est aujourd’hui ciblée par des attentats meurtriers perpétrés par des terroristes et les autorités poursuivent une répression sanglante contre toute opposition. Il y a déjà plus de 1 400 morts.

Le 3 juillet 2013, Mohamed Morsi, premier Président élu démocratiquement, a été évincé par l’actuel de l’Etat Abdel Fattah al-Sissi, alors chef de l’armée à cemoment-là. Et depuis, une vaste campagne militaire a été lancée contre les terroristes dans la région du Sinaï mais les autorités n’ont pas réussi à mettre fin aux attentats. Selon les autorités, des centaines de policiers et soldats ont été tués depuis. En avril, 14 personnes, en majorité des soldats et policiers, ont ainsi péri dans deux attaques revendiquées par la branche de l’organisation Etat islamique en Egypte, Ansar Beit Al-Maqdess, dans le Nord-Sinaï, région frontalière d’Israël et du territoire palestinien de la bande de Gaza, alors qu’une autre attaque avait coûté la vie à 15 soldats et deux civils.

Dernières attaques en date, mercredi 1er juillet, 17 soldats ont trouvé la mort, mais un bilan beaucoup plus lourd avait été annoncé par des sources médicales et sécuritaires, portant à 70 le nombre de morts. Les autorités ont rapidement minimisé et essuyé la perte humaine la plus sanglante sans expliquer l’écart entre les différents bilans. Ce jour-là, 100 terroristes de l’Etat islamique ont été abattus après huit heures de violents combats contre l’armée égyptienne dans le Sinaï. Les affrontements avaient débuté par une série d’attaques coordonnées contre quatre points de contrôle et barrages routiers dans cette région désertique.

Deux jours plus tôt, l’Egypte était sous le choc après l’attentat qui a coûté la vie au procureur général au Caire, le plus haut représentant de l’Etat, tué depuis le début de la vague d’attaques terroristes en 2013. L’EI n’a pas revendiqué ce meurtre, mais a appelé, il y a un mois, ses partisans à s’attaquer particulièrement aux juges, en réaction à la pendaison de six hommes reconnus coupables d’avoir perpétré des attaques au nom de l’EI. Désormais, les terroristes affiliés à l’Etat islamique (EI) semblent déterminés à entraîner les nouvelles autorités dans une escalade meurtrière. Le lendemain de l’attentat contre le procureur, le gouvernement a alors approuvé une nouvelle loi antiterroriste qui prévoit notamment « des procédures pour assécher les sources de financement du terrorisme » et doit « offrir une justice rapide et venger nos martyrs » pour faire face à l’explosion des actes terroristes.

Révolte et répression

L’Egypte a également vécu une vague de répression sanglante contre les Frères musulmans, dont est issu l’ex-Président islamiste. Sans compter que toute forme d’opposition ou voix critique y est interdite. Dans les mois qui ont suivi l’éviction de Mohamed Morsi, selon Human Rights Watch (HRW), policiers et soldats ont tué plus de 1 400 personnes, en majorité des manifestants islamistes et pro-Morsi dont plus de 700 en quelques heures dans la dispersion de deux sit-in pro-Morsi. Plus de 40 000 autres personnes ont été arrêtées ou poursuivies en justice, et plus de 15 000 autres emprisonnées dont des journalistes. Des centaines d’autres ont été condamnées à mort dans des procès de masse expéditifs, qualifiés par l’ONU de « sans précédent dans l’histoire récente » du monde. Mohamed Morsi a lui-même été condamné à mort, pour « évasion de prison et incitation à la violence » durant le soulèvement de 2011 contre Hosni Moubarak. Plusieurs dirigeants de la confrérie des Frères musulmans ont également écopé la même condamnation. La répression s’est élargie aux mouvements laïcs et de gauche, qui avaient impulsé la révolte de 2011.

Mercredi, la police égyptienne a tué neuf « terroristes » dont l’ancien parlementaire Nasser al-Houfi, un haut responsable des Frères musulmans, au cours d’un raid dans un appartement de la Ville du 6 Octobre en banlieue du Caire. Il s’agit en réalité, selon la confrérie, de neuf avocats Frères musulmans qui s’occupaient des cas des disparus et des morts causés par la répression anti-islamiste du gouvernement. Selon la police ils étaient recherchés pour des «actes de sabotage et de vandalisme».

Jeudi, plusieurs responsables des Frères musulmans, actuellement en exil, ont lancé des appels à la révolte « contre la tyrannie » en Egypte du régime d’Al-Sissi, une façon de célébrer la seconde commémoration de la destitution de l’ex-Président issu des Frères musulmans, Mohamed Morsi. Les appels à la révolte ne précisent cependant pas la date, le lieu ni la forme que celle-ci doit prendre. Dans la même journée, dans la Vallée et le Delta du Nil, se sont déroulées les funérailles des 17 militaires tués la veille au Sinaï. Des cérémonies au cours desquelles la foule a appelé à la vengeance, notamment contre les Frères musulmans jugés responsables des actes de violence.

Répression, révolte et terrorisme, l’Egypte le pays arabe le plus peuplé, n’a jamais été aussi mal. Le régime d’Abdel Fattah al-Sissi est pointé du doigt notamment par les organisations des droits de l’Homme pour sa politique répressive sans précédent dans l’histoire du pays.

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