Cameroun : mariage collectif à la Mairie de Douala


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Ils sont une quarantaine de couples à avoir tourné le dos au « viens on reste » ce lundi 15 mai devant Me. Denise Fampou, Maire de Douala 2.

La journée du 15 mai est déclarée par les nations unies comme journée internationale de la famille et le thème choisi pour la célébration de cette année est « famille et cohésion sociale pour un monde de paix ».

Pour matérialiser cette journée afin que celle-ci puisse avoir un impact sur ses populations, la Mairie de Douala 2ème avec à sa tête Me. Denise Fampou et la délégation d’arrondissement du Ministère de la promotion de la femme et de la famille de Douala ont pris l’heureuse initiative d’officialiser les unions de certaines des populations de cette circonscription.

C’est au total 40 couples qui ont participé à la cérémonie de mariage collectif de ce lundi matin à la Mairie de Douala 2ème. Ceux-ci n’ont eu à dépenser aucun franc puisque toutes les commodités d’usage ont été prises en charge par le Maire jusqu’aux timbres afin de ne pas décourager certains et renforcer le côté social de cette initiative.
Cette décision qui va en droite ligne avec la vision sociale de la mairie contribue à unir officiellement des couples qui vivaient depuis longtemps en union libre et ceci pour assurer une certaine sécurité à leur progéniture. Le constat fait est que plusieurs enfants sont souvent abandonnés à eux-mêmes après soit le décès du père soit la rupture entre les deux parents du fait du manque de documents officialisant l’union de ces parents.

Dans son allocution de circonstance, Madame le délégué régional du Ministère de la promotion de la femme et de la famille a tenu a rappeler les articles 212,213, 214 et 215 du code civil portant organisation du mariage. Elle a aussi énoncé les dispositions du tout nouveau code pénal en matière de mariage ceci pour sensibiliser les couples qui étaient à l’honneur ce lundi sur leurs responsabilités respectives après les engagements qu’ils ont pris.

Après avoir signé leurs actes de mariage, Madame le Maire a remis des présents à chacun des quarante couples qui ont convolé en juste noces ce lundi 15 mai.

Pour bien comprendre, il faut savoir que c’est depuis 2007 que des mariages collectifs sont célébrés au Cameroun. 52 couples avaient étrenné l’expérience. Une initiative de l’ancienne ministre de la Promotion de la femme et de la famille, Suzanne Bomback, décédée en août 2010. Le gouvernement entendait ainsi accompagner les couples et les familles dans la légalisation des unions coutumières et des unions libres. Il faut savoir qu’au Cameroun, comme dans bien d’autres pays africains, l’on peut se marier selon la coutume ou la tradition de son village ou de sa région d’origine.

Seulement, de telles unions doivent être concrétisées par un mariage civil, seul reconnu par la loi et seul à produire des effets juridiques. Mieux encore, les unions libres, pour leur part, se sont multipliées non pas seulement à cause de la modernisation de la société camerounaise mais plus sûrement à cause des difficultés socio-économiques que le pays connaît depuis plus de vingt ans.

La question de la dot

Il est de plus en plus difficile de se marier formellement parce que le mariage coûte cher. Il n’est plus à la portée des couches modestes qui constituent la principale « clientèle » des mariages collectifs. Dans la plupart des régions du pays, un prétendant, pour se marier, doit verser une dot à la famille de sa dulcinée. La dot, c’est de l’argent, des biens matériels et de la nourriture. Une liste très détaillée est remise au soupirant. Souvent, la dot peut s’élever à plusieurs dizaines de millions de francs Cfa (1 euro = 656 francs cfa), surtout si la femme à épouser a fait des études. On voit, tous les jours, des couples se séparer, parce que la dot n’a pu être versée. Inutile de préciser que des familles, contre la volonté de leurs filles, sont inflexibles là-dessus. Pire encore, le mariage lui-même, ne va pas sans des festivités qui mettent à mal les finances de jeunes couples qui ne font que démarrer leur vie commune.

Pour ces raisons, le mariage ne fait plus courir et le concubinage prospère. Les couples font alors ce qu’on appelle le « viens on reste ». Seulement, et c’est ce que le ministère de la Promotion de la femme et de la famille combattait, le concubinage n’est encadré par aucune loi et les partenaires, surtout les femmes, sont très vulnérables dans cette configuration. Il est très souvent arrivé qu’au bout de plusieurs années de vie commune avec des enfants à la clé, l’homme rompe la relation et abandonne la femme. Celle-ci se retrouve alors livrée à elle-même. C’est encore pire lorsque l’homme vient à disparaître. Et les enfants nés de telles unions ne sont pas davantage protégés. Les drames sont nombreux.

Avec les mariages collectifs, les pouvoirs publics encouragent les couples à venir devant le maire sans tralala et facilite les procédures. Il fallait d’ailleurs convaincre les couples de ce que le mariage, c’est davantage un acte d’adhésion et d’engagement que les agapes et les dépenses qui vont avec. La formule marche très bien et on a ainsi vu des unions libres vieilles de vingt ans se conclure. Les mariages collectifs sont régulièrement célébrés à travers le pays depuis 2007 et l’opinion y est très favorable. Elle y voit un moyen d’asseoir l’harmonie et la stabilisation des familles. Et à chaque fois, l’on se souvient de l’artisane de ces alliances groupées, Suzanne Bomback, de regrettée mémoire.

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