La nouvelle constitution rwandaise plébiscitée


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Selon les premiers résultats, 90% des électeurs rwandais se sont prononcés en faveur de la nouvelle Constitution, lors du référendum national organisé lundi dernier. Une Constitution qui, sous couvert de lutte contre le divisionnisme et l’idéologie génocidaire, permettra au pouvoir en place de se maintenir en muselant l’opposition.

La journée du lundi 26 mai a été déclarée fériée au Rwanda. 3,9 millions d’électeurs étaient appelés à se prononcer par référendum sur la nouvelle Constitution proposée par les autorités en place.  » Pour la rédiger, nous sommes venus devant la population depuis deux ans. Nous avons recueilli vos idées, vos sentiments « , assure Tito Rutarema, le président de la Commission constitutionnelle, au cours de l’une des 1 200 réunions que son institution a organisé depuis un mois pour expliquer la Constitution aux Rwandais.

Le nouveau texte législatif doit permettre au pays de mettre un terme à la période de transition commencée en 1994, après les massacres qui ont coûté la vie à près de 800 000 (entre 500 000 et un million selon les différentes estimations) Rwandais, Tutsis et modérés Hutus. Pour ne plus revivre un tel génocide, la nouvelle Constitution a mis l’accent sur la lutte contre le divisionnisme ethnique. Mais pour de nombreuses ONG, les autorités de Kigali exploitent ce prétexte pour museler l’opposition et se maintenir au pouvoir. En effet, des élections législatives et présidentielles doivent être organisées cette année, après l’adoption de la Constitution. Selon les premiers résultats partiels, le texte a recueilli 90% de  » oui « . Il est à noter qu’aucun parti n’avait appelé à voter « non ».

Encadrement des partis

La nouvelle Constitution interdit aux partis politiques de s’identifier à une race, ethnie, région, ou religion, sous peine de sanctions pouvant aller jusqu’à la dissolution. Le multipartisme, reconnu dès 1991, après 32 ans de parti unique, n’a pas été interdit après le génocide. Mais le droit d’exercer des activités publiques était refusé aux partis. Désormais, ils pourront à nouveau recruter des militants et s’adresser à la population.

Le multipartisme reste très encadré, les partis devant intégrer un forum de concertation des formations politiques, institution informelle créée après 1994, pour dégager un consensus sur les principales décisions.  » La population, que nous avons consultée, ne voulait pas des partis politiques, car le multipartisme de la période 1991-94 a laissé un mauvais souvenir « , explique Tito Rutaremara.  » C’est pour cela qu’on a décidé d’encadrer les partis, pour éviter les dérives « .

Musellement de l’opposition

Un encadrement qui confine à la censure et bafoue le droit à la liberté d’expression. Le régime en place n’a pas attendu l’adoption de la Constitution pour s’en prendre à ses opposants. L’ancien président rwandais, Pasteur Bizimungu (1994-2000), symbole de la réconciliation nationale après le génocide de 1994, est incarcéré depuis avril 2002 pour  » atteinte à la sûreté de l’Etat « , après avoir tenté de créer un parti. Le 17 mai, le gouvernement et le parlement, tous deux dominés par le Front populaire rwandais (FPR), l’ex-rébellion tutsie, ont annoncé qu’ils demanderaient  » dans les plus brefs délais  » à la justice de dissoudre le Mouvement démocratique républicain (MDR). Le parti, à majorité hutue, est accusé de divisionnisme. Il fait parti de la coalition gouvernementale et compte 13 députés sur 73 à l’Assemblée nationale de transition.

Le  » divisionnisme  » est une  » terminologie vague utilisée par le gouvernement pour priver l’opposition de son droit de représentation en cette année d’élection « , selon Amnesty International qui dénonce une  » campagne de répression orchestrée par le gouvernement contre l’opposition « . Human Right Watch renchérit en accusant le FPR de vouloir « éliminer toute opposition en prévision des futures élections ».  » Malheureusement, cela arrive avant les élections, mais ce n’est qu’une coïncidence « , a expliqué, pour sa part, le ministre de l’Administration, Christophe Bazivamo, à l’AFP.

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