Plaider pour les enfants


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L’Ethiopienne Aranka Kellermann se penche, pour son premier documentaire, sur le sort des ex-enfants soldats en Ouganda. Projeté lors du Fespaco dans la catégorie TV-vidéo, le film explore avec simplicité et respect la douleur de ces enfances brisées.

En Ouganda, 11 000 enfants ont été enlevés par l’Armée du front de libération entre 1996 et 2001 pour être enrôlés de force dans les rangs des rebelles ou servir d’esclaves sexuels. Aranka Kellermann, 30 ans, Hollandaise d’origine éthiopienne, est juriste au Bureau national contre le racisme à Amsterdam. Elle est allée à la rencontre de ces enfants brisés. Son documentaire de 25 minutes, Les ex-enfants soldats, a été projeté pour la première fois en public au Fespaco, dans la catégorie TV-vidéo.

Afrik : C’est la première projection de votre documentaire devant un public…

Aranka Kellermann : Oui, le film est passé sur la télévision hollandaise en juillet 2002 et en août à la télé belge mais là, c’est vraiment impressionnant, j’avais peur de la réaction des spectateurs ! Je crois que le message est passé car ce film est très simple, très abordable. C’est d’ailleurs cette simplicité qui fait ressortir les histoires racontées par les trois ex-enfants soldats (deux filles et un garçon, ndlr).

Afrik : Pourquoi avoir choisi ce thème ?

Aranka Kellermann : Je me suis toujours sentie très concernée par les droits des enfants. J’ai vécu dans un orphelinat en Ethiopie avant d’être adoptée à 3 ans et demi par des Hollandais. Les problèmes que peuvent rencontrer les enfants me touchent donc particulièrement. J’ai lu le livre d’une journaliste belge qui raconte l’enlèvement d’une centaine d’enfants dans une école du nord de l’Ouganda pour servir en tant que soldats… Je fais partie du conseil d’administration d’un théâtre pour jeunes à Amsterdam dont la troupe a monté une pièce à partir de cette horrible histoire. C’est ce qui m’a inspirée. Je me suis dit qu’il fallait aller plus loin et toucher plus de monde en réalisant un documentaire pour la télé. C’est un sujet qui doit être montré au grand public.

Afrik : Vous connaissiez l’Ouganda ?

Aranka Kellermann : Pas du tout ! Je m’y suis rendue pour filmer, en novembre 2001. J’ai été à Gulu, dans le nord, car c’est une région où les rebelles étaient très actifs et qui compte deux centres de réhabilitation pour les enfants qui réussissent à s’échapper. Pendant le tournage, l’endroit était plutôt calme et nous vérifions avec les soldats de l’armée ougandaise les coins dangereux. Au besoin, ils nous escortaient.

Afrik : On sent que les personnages du documentaires sont très émus de remuer leurs souvenirs…

Aranka Kellermann : C’était très dur pour eux de parler mais j’ai su les apprivoiser. Je leur ai beaucoup parlé du projet, j’ai dormi et joué avec eux. Aujourd’hui, j’espère retourner là-bas pour leur montrer le film. Ce qu’il faut savoir surtout, c’est qu’en Ouganda, le cauchemar continue. Un enfant s’est fait enlever hier (lundi, ndlr) à l’endroit où nous avons filmé et dix enfants de la famille de notre interprète ont été enlevés en trois mois. Il faut en parler

Afrik : C’est votre premier documentaire.

Aranka Kellermann : Oui et sûrement pas le dernier ! Ce travail m’a passionnée. Avec un tel sujet, on apprend beaucoup sur les êtres humains, les émotions, la vie en général. Ce qui m’a rendue heureuse, surtout, c’est d’avoir pu donner une voix à ces enfants. Ils se sont racontés comme ils le souhaitaient.

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