La tension reste très vive dans l’Est de la RDC


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La situation reste toujours tendue dans la province du Nord Kivu, bien qu’aucun coup de feu n’ a été entendu depuis la fin de l’ultimatum lancé par le gouvernement aux insurgés, le 15 octobre. Depuis, les deux parties sont toujours sur le pied de guerre. L’arrivée dimanche dernier du président Joseph Kabila à Goma prouve à suffisance que l’on est arrivé au point de non retour. Lundi 15 octobre, Kinshasa avait appelé les insurgés à se désolidariser de leur chef, l’ex-général Laurent Nkunda. Cette stratégie de la désertion commence à payer, car, selon le gouvernement congolais, plus de mille rebelles se sont rendus.

Notre correspondant à Kinshasa

Joseph Kabila, le président de la République démocratique du Congo (RDC), a promis mercredi, à Goma, « le désarmement forcé au besoin » du général dissident Laurent Nkunda et de ses hommes au Nord-Kivu (est), dans un discours de fermeté excluant toute discussion. Il n’a pas présenté un calendrier des opérations.

Le ministre de la défense, Chikez Diemu, qui accompagne le Chef de l’Etat, a annoncé que 1.200 insurgés ont rejoint les centres de brassage (processus congolais de reforme de l’armée). «Mais cela ne suffit pas, affirme un observateur militaire de la Monuc (mission de l’Onu), car Nkunda dispose de près de 5000 hommes». Il s’agit pour la plupart des «déserteurs» du côté de Nkunda. Pour l’instant, le général dissident refuse de désarmer et de démobiliser ses troupes. Il accuse le gouvernement de rompre le dialogue. En outre, les insurgés se disent prêts à riposter à toute attaque des forces loyalistes. Du côté gouvernemental, l’armée à renforcer ses positions en hommes, armes, matériels et équipements militaires. Des sources onusiennes ayant requis l’anonymat, parlent de 15 000 loyalistes prêts à en découdre avec 5000 insurgés. Sur le terrain, les forces loyalistes auraient pris de l’avance en resserrant l’étau autour des localités de Kalengiro et Mushake, dernier verrou avant le quartier général du chef des insurgés.

Drame humanitaire et enrôlement forcé des civils

Sur le terrain, la situation humanitaire reste préoccupante. «C’est une situation caractérisée par un drame humanitaire, dont on ne parlera jamais assez, bientôt 700.000 déplacés dans cette province», déclare Babacar Gaye, le commandant de la force de l’Onu en RDC. Il ajoute que «la MONUC est très consciente dans cette situation de ce qu’elle représente pour la population. C’est ainsi que nous nous organisons avec les humanitaires, nous apportons notre soutien pour toutes les escortes ainsi que pour la sécurité des zones des personnes déplacés». Plusieurs ONG locales affirment que des dizaines de civils fuient les zones de combats pour échapper aux enrôlements forcés. Chaque camp a démenti y avoir recours. Selon des informations concordantes, exposés aux maladies, à la faim, à l’épuisement et aux risques liés aux opérations militaires, les déplacés sont aussi grandement exposés aux risques de recrutement forcé.

Alphonse, qui a fui les villages contrôlés par Laurent Nkunda, explique qu’avec un groupe d’autres civils: «arrivés tout juste à Kilorwilo, là où réside Nkunda, on nous a fait descendre de force du véhicule qui nous transportait, et on nous a amené vers un centre de formation. A minuit, il y avait une forte pluie et j’en ai profité pour fuir avec 10 autres jeunes gens. Mais il n’y a pas que le général dissident qui recrute. Patrick de Vandome, le représentant local de OCHA (Office des nations unies pour la coordination des actions humanitaires) explique que «dans les zones de Shasha et de Kirushe, on a des rapports que les militaires de l’armée gouvernementale ont demandé à des civils de transporter des munitions ou de ramener les blessés du front vers les lignes arrières. Cela a posé des problèmes au niveau de certaines écoles, car les militaires se présentaient le matin et prenaient les jeunes pour leur demander ces travaux forcés». Les humanitaires tentent de sensibiliser les différentes parties, mais ils pensent que cela n’a porté aucun fruit.

Le Rwanda s’en mêle

Au cœur de cette rébellion nkundiste, il y a l’éternelle question des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda), les rebelles hutus rwandais, très actifs dans l’Est du Congo. L’ex-général Nkunda dit notamment vouloir protéger les Tutsi contre ces hommes que le Rwanda qualifie de génocidaires. La question, qui constitue également la pomme de discorde entre Kinshasa et Kigali, est également au centre de discussions entre les deux gouvernements.

Des solutions nouvelles

Des informations indiquent qu’en date du 4 octobre, le ministre rwandais des Affaires étrangères a écrit à son homologue congolais pour l’informer que des FDLR ont attaqué le Rwanda dans la nuit du 30 septembre, en passant une ligne de défense d’un bataillon de l’armée congolaise et auraient reçu des armes et du matériel de certains commandants de l’armée congolaise. Charles Murigande demande alors au Congo de mettre fin à la menace que représentent les FDLR et de s’abstenir de tout soutien à ces forces. En réponse, le chef de la diplomatie congolaise, Mbusa Nyamwuisi, transmet quelques jours plus tard à son homologue une proposition de plan de règlement du dossier ex-FAR/Interahamwe. Ce plan s’articule autour de quatre points, dont deux plus innovants : il s’agit de délocaliser les FDLR partisans d’un rapatriement volontaire au Rwanda, de leurs positions proches de la frontière avec le Rwanda vers des centres de transit. Ensuite, ceux qui refuseront de rentrer chez eux, pourraient bénéficier d’une réinstallation, hors frontière, mais au Congo, et auront un statut officiel de réfugiés. Pour l’instant Kigali n’a pas encore fait connaître sa réaction.

La Monuc appuie les forces loyalistes

Selon le général Babacar Gaye, les casques bleus de la Monuc offrent un soutien logistique aux forces armées congolaises. Par exemple a-t-il indiqué à la presse mercredi matin, «la Monuc effectue du transport de troupes. Hier, plusieurs rotations d’hélicoptères ont permis aux soldats des FARDC d’être déployés vers le Masisi où se déroulent en ce moment l’essentiel des combats. Ces derniers jours, les hélicoptères des Nations unies ont embarqué les hauts responsables militaires de la region Nord-Kivu pour des vols de reconnaissance. La Monuc joue également un rôle d’assistance et de conseil auprès du commandement militaire de la province, sur le plan opérationnel et stratégique».

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