Algérie : la Ligue des Droits de l’Homme accusée de dictature et de malversations financières


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La Ligue algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme traverse une grave crise. Ce qui au départ n’était que de simples accusations se transforme en un véritable scandale. L’ancien dirigeant de la Ligue, Mostefa Bouchachi aurait dirigé l’organisation de façon dictatoriale. Il est par ailleurs accusé d’y avoir détourné des sommes d’argent. Son successeur, Noureddine Benissad est quant à lui accusé de suivre la voie de Bouchachi.

Les dirigeants de la Ligue algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH) sont peut-être allés trop loin dans leur implication. Pas celle de défendre les droits des Algériens, mais dans la gestion financière de l’organisation qu’ils dirigent. L’actuel capitaine du navire, Noureddine Benissad, mais surtout son prédécesseur, Mostefa Bouchachi (député FFS), sont les premiers concernés dans cette affaire qui s’est mutée en un véritable scandale financier. Au point que le fondateur et président d’honneur de la LADDH, Ali-Yahia Abdenour, est intervenu, non pas pour défendre ses successeurs, mais les enfoncer dans de graves accusations.

Abdenour monte au créneau et accuse

Dans une lettre datée du 29 juin 2013, Ali-Yahia Abdenour, explique que lors du 3e Congrès de la LADDH, qui s’est tenu les 25 et 26 mars 2010, Mostefa Bouchachi s’est octroyé les pleins-pouvoir en changeant les statuts de la Ligue. Depuis, le Comité directeur, c’est-à-dire l’exécutif de la Ligue, « n’est plus élu par le Conseil national, mais désigné par le Président ». Bouchachi a ainsi supprimé le contre-pouvoir que représente le Comité directeur exécutif de la Ligue. Du jamais vu, « il est le premier président d’une ligue des Droits de l’Homme indépendante de par le monde, qui désigne l’exécutif qui doit être élu par le Conseil national issu du congrès ». Abdenour peint Bouchachi comme l’un des pires dictateurs du siècle dernier. « Jamais un tel cas de figure ne s’est présenté, même pas en Amérique latine, particulièrement en Argentine et au Chili, durant les dictatures où les Ligues des Droits de l’Homme étaient présidées par les colonels des services de renseignement ».

Lors de sa démission du poste de Président de la LADDH en mars 2012, l’actuel député FFS n’a pas daigné présenter son rapport de gestion et surtout financier, comme le lui avait demandé le Conseil national. Bouchachi, le Secrétaire général et le Responsable financier considéraient tout simplement la Ligue comme un bien financier, selon Abdenour. Un véritable « culte de l’argent » s’est instauré dans cette organisation qui a initialement pour but de défendre les Droits de l’Homme. Non seulement de sérieux doutes planent sur de possibles détournements d’argent orchestrés par Bouchachi himself, mais il s’est en plus dirigé sans complexe vers le pouvoir législatif. Or, un militant des Droits de l’Homme n’intègre pas le pouvoir, mais fait « toujours face au pouvoir ».

La LADDH dans une « grave situation »

Etant donné le contexte, le Président d’honneur a entrepris il y a deux mois de cela des rencontres avec les différents dirigeants de la LADDH, à commencer par le docteur Kamel Eddine Fekhar, membre du Comité directeur de la LADDH et président de la section de Ghardaïa. Celui-ci avait annoncé son intention de déposer plainte pour détournement des fonds de la Ligue. Même constat alarmant pour Chouicha Kaddour, membre du Comité directeur, et Mécheri Salim, président de la section d’Oran.

Il y a dix jours, Noureddine Benissad a, à son tour, exprimé son désir d’être reçu par le fondateur de la Ligue. Abdenour accepte à condition que le rendez-vous, qui a duré 2h15, se fasse à l’extérieur de la Ligue. Le Président d’honneur ne s’est plus rendu au siège depuis la dictature instaurée par Bouchachi. De plus, Benissad suit visiblement les pas de son mentor, étant donné qu’il a lui-même désigné les membres du Comité directeur. Ce qui est reproché à l’actuel Président, c’est son silence. Son silence sur « ce qu’il fait ». « Ses fautes se multiplient et s’accélèrent et il ne peut plus rien cacher de ce qu’il est et de ce qu’il fait », écrit le fondateur. Abdenour met en garde Benissad, qu’il qualifie d’immature et d’irresponsable face à une « fausse route qui mène à l’impasse ».

Après la publication de cette lettre [http://www.elwatan.com/contributions/lettre-ouverte-de-me-ali-yahia-abdennour-a-noureddine-benissad-01-07-2013-219420_120.php], des responsables du Front des Forces socialistes, auxquels la Ligue est apparentée, ont réagi via les réseaux sociaux pour démentir les propos d’Ali Yahia Abdenour. Du côté de la présidence de la Ligue, le silence radio est de mise. La Ligue est-elle au bord de la scission ? Pourquoi Mostefa Bouchachi n’a-t-il pas rendu compte des états financiers avant son départ de l’organisation ? Des questions qui, pour le moment, sont sans réponse. Mais le constat est là, un parfum de scandale plane sur la gestion de la LADDH.

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